Page 151 - Bouvet Jacques
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au four la pâte qui était là, toute levée dans la
huche. Le temps pressait : l'Oncle Jacques verse
dans le tablier de la pauvre femme autant de pâte
qu'il en peut contenir et lui dit : cc Allez vite,
« piamante, porter cuire ça pour vous et les
cc vôtres. >>
On vint une nuit sonner au presbytère. Louise
va ouvrir : personne. Seulement elle aperçoit sur
le seuil.un panier soigneusement recouvert. Quelle
ne fut pas sa surprise, quand sa main, glissant
légèrement sur le panier, va réveiller et faire
pleurer un petit enfant! Aux cris de l'enfant et de
Louise, le curé accourt, en même temps que M.
Millioz, vicaire. Tous s'approchent du petit Moïse,
exposé dans sa corbeille. On cherche des indices
et on trouve un chiffon qui ne portait que ces
mots : l'enfant est a curé. L'abbé tremblait qu'on
eût voulu faire une plaisanterie outrageante à
son curé ; mais celui-ci prend le panier, puis monte
l'escalier en dorlotant et pouponnant l'enfant.
<< Louise, vous serez la mère nourricière de ce
« petit. ,> Louise, à son tour, proteste et refuse,
alléguant pêle-mêle l'impossibilité, l'inconvenan-
ce, le qu'en dira-t-on. - « Tu ne vaux pas la
« fille de Pharaon ; mais, pour ce soir, trouve-lui
« un peu de lait. » Puis, tenant P.ncore à la main
le chiffon mentionné, il place une cédille sous le C
et le présente à lire à M. Millioz, qui respire enFn,
lorsqu'il eut trouvé et prononcé : l'enfant est
aSSuré, ce qui signifiait tout simplement que
l'enfant avait été baptisé.
On rit beaucoup en ville de cette aventure;
mais, telle était la réputation de M. Bouvet que,