Page 682 - Merveilles Industrie Tome 4
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             refait et on démolit ces tas selon les besoins.   elle est l’objet d’une vente courante à
             Quand la viande est ainsi bien salée, on l’é­  Liverpool, où les masses la consomment
             tend sur des perches, dans de vastes enclos,   sans répugnance, mêlée aux pommes de
             en plein air. Au bout de quelques jours de   terre. On peut la livrer au prix moyen
             cette exposition, elle est sèche et on la inet  de 50 centimes le kilogramme. De toutes
             en barils.                                les préparations de ce genre, le tasajo
               Le tasajo, ainsi obtenu, représente 1/4 en  salé et pressé se mble jusqu’à présent la
             poids de la viande fraîche. On l’exporte au   moins chère et la plus pratique. 11 serait
             Brésil et à la Havane, en quantités considé­  donc bien à désirer que ce produit ali­
            rables. ’ Les meilleures qualités se payent  mentaire fût acclimaté en Europe, qu’il ar­
            22 centimes le kilogramme et pourraient  rivât dans nos ports en bon état et pût être
            être livrées en Europe au prix de 40 cen­  livré à un prix modique. Quand on songe
            times.                                     que l’Europe pourrait tirer sans peine, tous
               Les viandes ainsi conservées servent gé­  les ans, un million de bœufs ou de vaches
            néralement, au Brésil et à Cuba, pour la   de la République Argentine, et probable­
            nourriture des blancs et des noirs, après   ment 5 à 6 millions du Brésil, on trouve
            qu’elles ont été cuites avec du lard frais,   que ce serait là l’abondance pour bien des
            des haricots noirs ou de la farine de ma­  familles, peut-être même Je moyen de rele­
             nioc.                                     ver le niveau intellectuel et moral des popu­
              MM. Cvbils et Jackson, propriétaires de   lations pauvres de l’Europe. Malheureuse­
            l’Uruguay, eurent l'idée, en 1866, de sou­  ment. dans l’état actuel des choses, soit en
            mettre le tasajo salé à la presse hydrauli­  raison des mauvaises conditions de leur
            que, lorsqu’il est à peu près sec. La pression  arrimage dans la cale des navires, soit par
            le moule en cubes durs, très-compactes, qui  leur mauvaise préparation, les viandes con­
            sont d’un transport et d’une conservation  servées exportées d’Amérique n’ont pu être
            faciles, sans aucun soin particulier. On en  acceptées par nos populations. Elles rendent
            forme, à la presse hydraulique, des ballots,   de grands services en Amérique aux chas­
            de 0m,60 de longueur sur0m,30 de largeur  seurs, aux colons, mais il se passera bien du
            et 0m,30 d’épaisseur, du poids de 46 kilo­  temps encore avant qu’elles puissent péné­
            grammes environ, qu’on enveloppe de toi­   trer dans la consommation européenne, à
            les fortes et serrées. La pression a non-seu­  cause de leur goût rance et de leur dureté.
            lement pour objet de diminuer le volume
            de cette matière, mais encore de contribuer   Poudre de viande. — On appelle poudre
            puissamment à la conservation.             de viande, un produit déjà ancien, car nous
              Le tasajo salé, quand il a été bien préparé,  l’avons mentionné dans l’historique de cette
            et qu’on a enlevé le sel en le faisant séjour­  Notice, et qui s’obtient en desséchant la
            ner dans l’eau fraîche, produit un bouillon  viande, et la réduisant en une sorte de
            et un bouilli excellents. La seule précaution  poudre. En 1855, pendant la guerre de
            à prendre est de ne pas le garder dans un  Crimée, ce produit fut employé par nos
            lieu trop humide. Pour la consommation,    troupes, mais sans grand succès. Prévoyant
            on fait ramollir cette viande dans l’eau, ce  qu’il serait difficile de faire vivre nos sol­
            qui la dessale, puis on la prépare sous  dats dans l’intérieur de la Crimée, l’admi­
            forme de ragoût.                           nistration de l’armée avait songé à assurer
              Cette préparation arrive aujourd’hui en  leur subsistance en les pourvoyant de viande
            Europe en assez grandes quantités, déjà    de garde. Le procédé que M. Cellier-Blu-
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