Page 673 - Merveilles Industrie Tome 4
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LES CONSERVES ALIMENTAIRES.                                667

         viandes. 11 suffit d'immerger ces viandes    D'autre part, le prix de cette matière, qu’on
         dans une dissolution aqueuse d'acide phéni­  extrait maintenant de l’acide phénique, est
         que contenant 1 à 4 millièmes de cet acide.  toujours assez élevé (de 25 à 30 francs le
           Comme l’acide phénique exerce une ac­    kilogramme) et tout donne à penser que
         tion trop énergique sur les tissus, l'auteur  cette circonstance et la durée trop limitée de
         tempéra cette action par La modification sui­  son effet antiseptique en resteindront l’u­
         vante. On imbibe du poussier de charbon    sage.
         avec le liquide phéniqué, et c’est entre des
         couches ou des strates de ce charbon, que l'on
         place les fragments de viande à conserver,
         après que ces fragments ont été enveloppés              CHAPITRE V
         de toiles. Le charbon fait, pour ainsi dire,
                                                    l’enrobage DES VIANDES. — LA CONSERVATION DES
         office d'écran et barre le passage aux agents       VIANDES PAR L’AIR COMPRIMÉ.
         septiques.
           L'acide phénique est un antiseptique par   Une autre méthode que nous avons à si­
         excellence et rien ne fait craindre que son  gnaler, pour la conservation de la viande, doit
         emploi soit dangereux; il n’est pas d’un prix  être mise dans un chapitre à part, parce
         élevé et il s’oppose bien à la putréfaction ;   qu’elle diffère des précédentes en ce que l’on
         mais son odeur désagréable serait un obsta­  n’agit ni par la dessiccation, ni par les agents
         cle pour la conservation du plus grand nom­  antiseptiques. Nous voulons parler del'ewo-
         bre des substances alimentaires.          bage, qui consiste à prévenir la putréfaction
           On lui a substitué, depuis 1874, Vacide  des viandes en les enveloppant d’une couche
         salycilique, un de ses dérivés chimiques. Cet  continue d’une matière étrangère, qui les
         acide est sans odeur, a un goût très-faible, et  isole de l’air, l’agent essentiel de toute fer­
         son effet a paru certain dans les premières  mentation.
         expériences qui ont été faites. Des viandes,   Ce procédé, qui fut mis en pratique à
         des poissons, des fruits, des légumes, du   Paris, en 1854 par une société qui avait
         beurre, des œufs, des confitures, des bois­  pris le titre de Société générale de conserva­
         sons, des liqueurs diverses, du lait, des sa­  tion des viandes, consiste à envelopper des
         vons, des cosmétiques, etc., traités par l’a­  quartiers de viande crue d’une couche
         cide salycilique, se voyaient à l'Exposition   épaisse d’une sorte de gelée, obtenue en sou­
         d’hygiène et de sauvetage de Bruxelles, en   mettant à une longue ébullition certaines
         1876.                                     parties du corps de l’animal.
           Quelle est en réalité l’efficacité de l’acide   Il y a déjà longtemps que l’on a essayé de
         salycilique, et jusqu’à quel point peut-on   conserver les viandes, en les préservant de
         compter sur son action?                   l’action de l’air par une enveloppe ou enduit
           Des expériences récentes de M. liolbe ré­  imperméable.
         pondent à cette question. La conservation   Vilars, de Bordeaux, eut le premier, en
         produite par l’eau chargée d’acide salycili­  1769, l'idée d’envelopper d’une couche de
         que est réelle, mais elle est loin d’être aussi  gélatine les viandes destinées aux voyages de
         complète et aussi durable qu’on l’avait.sup-  longs cours. Dizé et le chimiste Darcet mirent
         posé. Elle ne dépasse pas deux ou trois mois.   en pratique, sur une plus grande échelle, ce
         La bière additionnée d’acide salycilique se  même moyen. Pour garantir les viandes de
         recouvre de moisissures au bout de deux  l’altération pendant quelques semaines,
         mois et le pain au bout de six semaines.  Dizé et Darcet les recouvraient d'une couche
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