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LES CONSERVES ALIMENTAIRES. 647
qui l’a dégourdi, qui a fait du lourd et in abord, la réponse à cette question semble
culte paysan, un homme alerte, intelligent facile. Le manque d’animaux de boucherie
et vigoureux. Nous croyons que la nourri n’existe pas, tant s’en faut, dans toutes les
ture est pour beaucoup dans ce résultat. Si parties de notre vaste globe. Tandis que
les spectacles variés et instructifs que le nous manquons, en Europe, de bœufs, de
jeune soldat a eu sous les yeux, pendant son vaches et de moutons, il est des contrées plus
service, ont développé son intelligence, on heureuses, comme les plaines de l’Améri
ne saurait douter qu’un bon régime alimen que méridionale, celles de la Hongrie, en
taire ait préparé son esprit à recevoir de nou Europe, diverses régions de l’Asie, et l’Aus
velles notions et à en profiter. Dans les cam tralie, auxquelles on pourrait joindre, si
pagnes, un homme qui a son congé, c’est-à- la civilisation avait pénétré dans ces para
dire qui a accompli son service militaire, ges, d’immenses étendues au cœur de l’Afri
est recherché par toutes les filles du canton : que, qui nourrissent de grandes quantités de
c’est le coq du village. Les campagnes pro troupeaux paissant en liberté dans des her
clament donc, sans s’en douter, les avanta bages naturels, et dont la viande se perd, inu
ges du régime alimentaire animal. tile à personne. Avec notre luxe de moyens
On peut conclure de là qu’il est urgent de de communication, avec nos bateaux à va
réformer l’alimentation du paysan. Si l’on peur, qui franchissent en huit jours l’inter
veut créer une population robuste et intelli valle qui sépare l’ancien et le nouveau mon
gente, il faut remplacer, dans l’alimentation de ; avec nos chemins de fer, qui couvrent de
du paysan, les légumes, les fruits, le fro leur infini réseau toute la surface du globe,
mage, les féculents et les farineux, qui et rattachent d'une manière non interrom
alourdissent le corps et nuisent au dévelop pue ses points les plus éloignés, comment
pement des facultés, par l’usage réconfor se fait-il que les contrées qui regorgent de
tant de la viande. Il faut que les paysans troupeaux, n’expédient pas ces richesses,
puissent avoir, sinon Va poule au pot, comme improductives pour eux, aux pays qui en sont
le voulait le bon roi Henri, au moins de la privés? Comment n’organise-t-on pas d’im
viande deux ou trois fois par semaine. On menses convois d’animaux vivants, allant de
verrait alors notre population des champs la Plata, de la Bolivie ou du Texas en Eu
changer d’aspect, tant physique que moral, rope, de l’Australie en Europe, ou seule
devenir apte à s’instruire et à profiter de ment de la Hongrie en France et en Angle
ce qu’on lui aurait appris, se diriger avec in terre? Ces échanges de bétail vivant ne sont
telligence dans ses travaux de culture ou malheureusement pas réalisables dans la
d’élève du bétail, s’intéresser aux affaires pu pratique, à moins que la distance à franchir
bliques, comprendre ses intérêts et ses de ne soit très-faible. L’Angleterre, la France, la
voirs. On parle d’instruction obligatoire pour Suisse,l’Espagne etl’Italie, peuvent échanger
nos campagnes ; nous n’y contredisons pas, parles chemins de fer, du bétail vivant; la
mais nous voudrions que l’on commençât Hongrie peut en envoyer à toute l’Allemagne
par la viande obligatoire. et à la Russie, par des voies ferrées; mais
Cependant nous n’en sommes pas encore, faire entreprendre à des troupeaux des voya
hélas ! à la viande obligatoire. Nous som ges maritimes d’une durée de quelques mois,
mes, au contraire, en présence d’une triste serait impossible. Les mouvements du na
pénurie de viande, dans le régime alimen vire rendent promptement les animaux ma
taire des populations, tant rurales qu’ur lades; et, d’autre part, la nourriture qu’on
baines. Qu’v a-t-il donc à faire? Au premier pourrait leur donner pendant la traversée,