Page 641 - Merveilles Industrie Tome 4
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LES HUILES.                                  633

        vite à mesure que l’air est plus complète­  tacher à mesure qu’il est soulevé et attiré
        ment chassé des bronches et remplacé par  sur le pont. C’est ainsi que l’on dévide, pour
        de l’eau.                                  ainsi dire, la peau de baleine, en faisant
                                                   tourner le corps sur lui-même.
          Pour compléter ce qui concerne la pêche    Dans les mers du Sud, la carcasse n’est
        de la baleine, il nous reste à parler du dé­  pas plutôt jetée à la mer et détachée du na­
        pècement de l’animal, et de la fonte du lard,  vire, qu’elle est littéralement couverte d'oi­
        pour en retirer l’huile.                   seaux, particulièrement de pétrels et d’al­
          Quand la baleine est morte, on la fixe  batros. Les requins viennent aussi prendre
        le long du navire, le ventre en l'air, la  leur part du festin. Les os de la baleine
        queue en avant et le nez correspondant au   roulés, et amoncelés dans des criques, sont
        panneau de l’arrière. Ce n’est pas sans peine   ensuite emportés par des navires; ils con­
        que l'on peut remorquer, pour l'amener à   stituent une véritable mine de noir animal.
        terre, cette masse énorme, qui tout à        Avant d’être emmagasinées dans la cale
        l’heure traversait la mer avec tant de ra­  du navire, comme produits de retour, les
        pidité.                                    parties enlevées au corps de la baleine doi­
          Les anciens pêcheurs du nord de l'Europe  vent subir diverses préparations.
        dépeçaient la baleine en descendant le long   Chaque morceau de lard est divisé, à
        de son dos, munis de bottes à crampons de  l’aide d’une machine, en tranches d’un cen­
        fer. Ils enlevaient ainsi des bandes de lard,   timètre d’épaisseur; puis on procède à la
        dans toute la longueur de l’animal, de la   fonte, qui a pour objet de séparer l’huile de
        tête à la queue. Mais ce mode de dépècement  cette énorme couenne graisseuse.
        était long, difficile et même dangereux.     L’opération de la fonte s’effectue sur le
          Les pêcheurs de l’Océan méridional sui­  pont du navire, au moyen d'un fourneau
        vent un procédé meilleur. Il consiste à dé­  que l’on entretient avec des gravillons, c’est-
        couper, le long du corps de l’animal, une  à-dire des fragments de tissu cellulaire qui
        large bande, en forme d’hélice continue,   viennent flotter à la surface de l’huile quand
        commençant à la tête et ne finissant qu’à   elle est fondue. Une baleine ordinaire suffit
        la queue, à peu près comme font les en­    à sa propre fonte, et même laisse encore
        fants lorsqu’ils enlèvent l’écorce d’une   assez de résidu pour commencer la fonte
        orange.                                    suivante. La base du fourneau ne repose pas
          Le docteur Thiercelin raconte avec beau­  directement sur le pont; elle en est séparée
        coup de détails l’opération du dépècement  par un espace libre, dans lequel on fait
        de la baleine, sur laquelle nous ne saurions   circuler constamment de l’eau froide, qui
        nous arrêter d’avantage ici. Il nous suffira  ramène les parties voisines du pont du na­
        de dire qu’on sape, à l’aide de pelles tran­  vire à une température inférieure a 100°.
        chantes, un des côtés de la lèvre inférieure   Sans cette précaution, l’incendie serait con­
        de la baleine et qu’on enlève cette partie,   tinuellement à craindre.
        qu’on détache ensuite la langue, qui pèse    La quantité d’huile fournie par une seule
        plusieurs milliers de kilogrammes ; puis  baleine peut s’élever jusqu’à 25 ou 30 hec­
        l’autre moitié de la lèvre, et la mâchoire   tolitres.
        supérieure, avec ses fanons qui sont de plus
        en plus recherchés dans le commerce. Enfin,   Le cachalot (Physeter macrocæphalus')
        on commence à couper un ruban épais de  (fig. 339) est un cétacé que l’on chasse éga­
        graisse et de peau, que l’on continue à dé­  lement pour l’huile qu'il peut fournir. C est
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