Page 645 - Merveilles Industrie Tome 4
P. 645

LES HUILES.                                   639


        à plusieurs reprises sur du charbon animal. Par là   transparence, à fermer les ouvertures qui
        on obtient une huile claire, presque incolore, et   donnent un peu de jour à leurs tristes ré­
        d'une odeur moins repoussante; mais quant à
        l’avoir inodore, il faut y renoncer.       duits.
          « Les épurateurs qui se vantent de livrer au com­  Aussi l’unique occupation du Groënlandais
        merce de l’huile complètement désinfectée, se font   est-elle, pour ainsi dire, de chasser le pho­
        illusion ou trompent sérieusement le public. Ce
        qu’ils vendent sons ce nom n’est autre chose qu’un   que. Dès ses plus jeunes années, il est dressé
        mélange d’huile de baleine et d’huiles de graines,   à cet exercice, qui est, pour lui, une question
        dans lequel cette dernière entre pour la moitié ou   de vie ou de mort. Tantôt il s’élance sur la
        les trois quarts. »
                                                   mer, dans son fragile canot, et harponne sa
                                                  proie lorsqu’elle vient respirer à la surface;
          Deux autres mammifères, le marsouin (qui   tantôt il s’enveloppe d’une peau de pho­
        appartient à l’ordre des Cétacés) et le phoque   que, et, s’étendant sur le rivage, il s’efforce
        (<jui appartientà l’ordre des Amphibies) four­  d’attirer quelque innocent par ce simulacre
        nissent également des huiles au commerce  trompeur.
        et à l'industrie. L’huile de marsouin a      Les Esquimaux prennent encore le pho­
        peu d’importance commerciale, mais celle   que de la manière suivante. Ils pratiquent
        que fournit le phoque, joue un grand rôle   un trou dans la glace, et, au moment qu’un
        dans l’industrie des peuples septentrio­  de ces animaux se présente à cette lucarne
        naux.                                     improvisée, pour respirer l’air, ils s’en em­
                                                  parent.
          Toutes les populations riveraines des mers   Les Anglais et les Américains des États-
        polaires poursuivent les phoques, et en dé­  Unis sont les seuls peuples qui organisent
       truisent des quantités incalculables. Elles   sur une grande échelle la chasse du phoque.
       trouvent dans ces animaux de précieuses res­  Ils y consacrent annuellement une soixan­
       sources contre la rigueur et la désolation du  taine de navires, de 230 à 300 tonneaux
       climat hyperboréen. Pour les Groënlandais   chacun. Le but commercial de ces expédi­
       surtout, le phoque est d’une utilité sans   tions, est de recueillir l’huile dont est saturée
       égale. Il répond à la plupart de leurs be­  la chair de ce mammifère aquatique. Pour
       soins , et leur rend la vie possible dans la   extraire cette huile, on coupe en morceaux le
       froide contrée à laquelle ils sont atta­   corps de l’animal, et on jette les morceaux
       chés.                                      dans des chaudières établies sur la grève.
         Le Groënlandais mange lachair du phoque,  On laisse refroidir le liquide qui a servi
       et s’en contente, bien qu’elle soit coriace et  à préparer cette décoction, et par le refroi­
       d’une odeur désagréable. Il en extrait l’huile   dissement, la graisse se sépare. Alors on la
       et la fait servir à son éclairage. Avec sa peau,   met en barils, pour l’exporter en Europe ou
       il confectionne des vêtements, des couvertu­  en Amérique, où elle se vend à raison de
       res, des tentes, des canots, ou bien il la dé­  80 francs le baril. Chaque phoque peut four­
       coupe en courroies et en lanières. Ses  nir un demi-baril d’huile.
       tendons sont convertis en fils pour la cou­  Pour récolter un maigre profit, les pê­
       ture et en cordons pour les arcs. Le sang du  cheurs des côtes et des îles delà Baltique af­
       phoque, mélangé avec d’autres substances,   frontent, tous les ans, les plus grands dangers
       forme une espèce de soupe. 11 n’est pas jus­  à la chasse du phoque. Lorsque arrive la
       qu’aux membranes de l'intérieur du corps  fonte des glaces, ils s’embarquent, au nom­
       qui ne reçoivent leur emploi. Convenable­  bre de cinq, six ou quelquefois moins, sur
       ment desséchées, elles servent, grâce à leur  un canot, munis de vivres et d’engins meur-
   640   641   642   643   644   645   646   647   648   649   650