Page 496 - Merveilles Industrie Tome 4
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                entier, par la fermentation, en alcool, que  tières contiennent une certaine quantité d’a­
               Ton sépare ensuite du liquide fermenté par  cide acétique, qui, se combinant à l’alcool,
               la distillation.                           pendant la distillation, forme de l’éther
                  La fabrication de l’alcool aux colonies  acétique. L’éther acétique se mêle au rhum
               au moyen des résidus des fabriques de su­  distillé, et lui communique une saveur
               cre de canne, est une opération des plus  particulière. Cette saveur est agréable tant
               simples. Elle se réduit à étendre la mélasse  que la proportion d’éther acétique ne dé­
               d’une quantité d’eau suffisante pour que  passe pas une certaine limite. Il y a donc
               le moût sucré ait la même densité et  avantage à empêcher autant que possible
               que les opérations se fassent ainsi sur des  la fermentation acétique de ne pas trop se
               liquides d’un poids spécifique toujours uni­  propager. On y arrive en entretenant une
               forme. Quand la mélasse a été étendue  propreté extrême dans les cuves et en en­
               d’une quantité d’eau convenable, il n’est  levant soigneusement tous les restes et dé­
               même pas nécessaire d’y ajouter de fer­    bris d’une opération, avant d’en commen­
               ment. La grande quantité de matières  cer une nouvelle ; car ces débris, au contact
               étrangères que renferme le îiesow (jus de  de l’air, se transforment très-rapidement en
               la canne), fait qu’il existe déjà dans ce li­  ferment acétique.
               quide un ferment capable de provoquer la     Le rhum de la Jamaïque de qualité supé­
               transformation du sucre en alcool et acide  rieure possède un parfum particulier, qui
               carbonique. Abandonnées à elles-mêmes, en  rappelle, en quelque chose, celui du cuir
               présence de l’air et à la température élevée   frais. Cet arôme n’est pas obtenu, comme
               du climat des Antilles ou des régions cir-  quelques-uns se l’imaginent, en faisant in­
               convoisines, les mélasses de betteraves éten­  fuser du cuir dans le moût alcoolique ; mais
               dues d’eau fermentent spontanément, et il  en ajoutant au moût, pendant sa fermenta­
               n'y a plus qu’à distiller le liquide fermenté.   tion, des morceaux de canne à sucre frais.
               La seule précaution à prendre, si les mé­  Les huiles essentielles aromatiques qui exis­
               lasses ont une réaction alcaline, c’est d’a­  tent dans le jus de canne frais, passent dans
               jouter un peu d’acide sulfurique, pour  le moût fermenté et ensuite dans le pro­
               saturer l’alcali. Il faut employer assez  duit distillé. Quelques fabricants ajoutent
               d’acide sulfurique pour que la liqueur  même à la cuve à fermentation du jus
               rougisse faiblement le papier bleu de tour­  d’ananas.
               nesol.                                       Dans les Indes occidentales, comme à
                  On appelle rhum, ou tafia,le produit de la  Batavia, à Sumatra, où il existe aujourd'hui
               fermentation des mélasses du sucre de  un grand nombre de sucreries, parfaitement
               canne aux colonies.                        outillées, on transforme également une par­
                  Le meilleur rhum est celui que l’on ob­  tie des mélasses en rhum. Voici comment on
               tient avec la mélasse seule étendue d’eau,   opère. On recueille les écumes pendant la
                abandonnée à la fermentation spontanée  cuisson du jus du sucre de canne, et on les
               sans addition de levûre, et distillée avant  place dans un grand cuvier, en y ajoutant
                que le produit ait eu le temps de passer à la  4 pour 100 de mélasse, étendue de 25 pour
                fermentation acétique.                    100 d’eau. On mélange bien le tout, et on
                  Les rhums de qualité inférieure sont pré­  le laisse fermenter spontanément jusqu’à
                parés en ajoutant à la mélasse toute espèce  ce que tout le sucre ait disparu. Comme la
                de déchets de la fabrication coloniale :   distillation fournit des produits de diffé­
                écumes, eaux douces, etc. Ces diverses ma­  rentes valeurs, on mêle ces produits suivant
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