Page 402 - Merveilles Industrie Tome 4
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396                    MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.


                   « Des appareils employés pour exécuter le bras­  cales disposées en chicane, entre lesquelles on em­
                 sage, cuves-matières, pompes, chaudières à vaguer,   pile de gros blocs de glace, de manière à remplir
                 cuves-réverdoires, etc., je n’ai rien à dire : leurs   exactement les compartiments formés par ces cloi­
                 dispositions ne présentent, en effet, aucune particu­  sons. Au-dessus de la bâche, en outre, on élève,
                 larité que nos praticiens ne connaissent.  au moyen de planches grossières, une hausse
                   « Lorsque la dernière trempe est terminée, le   de lm,50 environ, contre les parois de laquelle on
                 moût, débarrassé de la drèche par filtration, est   accumule de même une quantité de glace aussi con­
                 conduit aux chaudières où doivent avoir lieu simul­  sidérable que possible, et qui, au fur et à mesure de
                 tanément sa coction et son houblonnage. Ces chau­  la fonte des blocs enfermés dans la bâche, puisse
                 dières sont, en général, de très-grandes dimensions,   par son propre poids les y venir remplacer. Dans le
                 et contiennent quelquefois jusqu’à 300 hectolitres   premier compartiment cloisonné, on fait arriver un
                 de moût. Le chauffage en a lieu toujours à feu nu ;   courant d’eau, aussi fraîche que possible, qui, s’é­
                 le houblon y est ajouté peu à peu, généralement en   coulant de haut en bas dans ce compartiment, re­
                 (rois fois, au cours de l’ébullition, mais, ainsi que je   monte ensuite de bas en haut dans le compartiment
                 l’ai précédemment indiqué, les proportions en sont   suivant, pour redescendre dans le troisième, et ainsi
                 extrêmement variables suivant les provinces, et les   de suite jusqu’à l’extrémité de la bâche, où il arrive
                 bières qui en résultent diffèrent conséquemment   enfin après avoir léché et partiellement fondu les
                 beaucoup.                                  blocs de glace disposés sur son parcours, et après
                   « C’est ainsi que, pour les bières viennoises, la   s’être, à leur contact, refroidi à 0° centigrade.
                 proportion ne dépasse pas 330 à 350 grammes par   « C’est à cette température que l’eau pénètre dans
                 hectolitre pour les bières de garde et 400 grammes   les réfrigérants ; elle s’y chauffe au contact des parois
                 par hectolitre pour les bières d’exportation, tandis   entre lesquelles le moût se trouve enfermé, tandis
                 qu’en Bohême, à Pilsen, cette proportion s’élève à   que celui-ci, au contraire, se refroidit ; et les choses,
                 500 et 550 grammes par hectolitre de bière.  en général, se passent de telle façon qu’au sortir du
                   « C’est à l’introduction de ces grandes quantités   refroidissoir le moût et l’eau se trouvent l’un et l’au­
                 de houblon, quantités qui se rapprochent de celles   tre ramenés à la température de 3 ou 4° centi­
                 qu’emploie la brasserie anglaise, qu’est due l’amer­  grades.
                 tume particulière des bières de Pilsen. Pour certains   « Le moût est aussitôt conduit aux cuves de fer­
                 consommateurs, cette amertume constitue une qua­  mentation ; celles-ci, bien loin de ressembler aux
                 lité, et, même à Vienne, on voit aujourd’hui les   vases gigantesques de l’Angleterre, sont toujours
                  bières de Pilsen prendre faveur; mais c’est là, à   de petite dimension; elles ne contiennent, en géné­
                 mon sens, une erreur de goût, et les bières de   ral, que 30 à 35 hectolitres ; aussi le nombre en est-
                 Vienne, avec leur arôme fin et délicat, me paraissent   il extrêmement considérable, et les grandes brasse­
                 de beaucoup préférables aux bières amères de Pilsen,   ries de Dreher, de Liesing, de Saint-Marx, en comp­
                 comme aussi aux bières anglaises.          tent-elles chacune un millier environ en travail.
                   « Le refroidissement du moût cuit et houblonné   Rangées, en ordre serré, les unes à côté des autres,
                 s’accomplit en deux phases successives. Abandonné   ces cuves sont, au moyen de dés en pierre, élevées
                 d’abord dans les grands refroidissoirs plats dont   de 40 à 50 centimètres au-dessus du sol. Le moût y
                 l'usage est universel en brasserie, il tombe, en   est entonné, comme je viens de le dire, à la tempé­
                 quelques heures, à la température ambiante, puis, à   rature de 3 ou 4”, et aussitôt il est mis en levain ;
                  l’aide d’un refroidissement artificiel, il est ramené   10 à 12 litres de levûre non pressée, provenant d’une
                  rapidement à une température aussi voisine que pos­  opération précédente, sont, dans ce but, ajoutés à
                  sible de zéro.                            chaque cuve de 30 hectolitres.
                   « On connaît les appareils dans lesquels ce re­  « La fermentation ne tarde pas à se déclarer;
                  froidissement artificiel se produit ; ce sont tantôt de   mais, on ne l’a pas oublié, la condition essentielle
                  grands serpentins en cuivre, noyés dans un bac ou­  de sa réussite est que, pendant toute sa durée, la
                  vert, tantôt des serpentins doubles s’enveloppant l’un   température soit maintenue aussi voisine que possi­
                 l’autre, généralement horizontaux, quelquefois ver­  ble de zéro. Pour y parvenir, et pour contre-balancer
                  ticaux, et disposés, en tout cas, de telle sorte que le   l’élévation de température qui résulte du phénomène
                  moût chaud circule dans l’une des deux capacités,   chimique de la fermentation lui-même, le brasseur
                  tandis que l’autre est traversée par un courant d’eau   place dans chacune de ces cuves un nageur rempli
                  glacée marchant en sens contraire du courant de   de glace. C’est généralement un cylindre en cuivre
                  moût.                                     étamé, à collerette évasée, auquel M. Noback a eu
                   « Pour obtenir cette eau glacée, on emploie, en   l'ingénieuse idée de donner une surface ondulée,
                  Autriche, de grandes bâches en bois de 6 mètres de   dont la hauteur mesure 80 centimètres environ et le
                  longueur sur 2 mètres de largeur et 2 mètres envi­  diamètre 50 à 60 centimètres.
                  ron de hauteur. Ces bâches sont divisées, dans le   « Pendant quatre jours la fermentation monte,
                  sens de la largeur, par une série de cloisons verti­  puis elle se ralentit ; si l’on opère en été, pour la
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