Page 346 - Merveilles Industrie Tome 4
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340                   MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.                                                                                      LA BIÈRE.                                  341

                                                                                                                  sucre qui a pris naissance aux dépens de l’a­
                                                                                                                  midon, sous l’influence de la diastase, dis­
                                                                                                                  paraîtrait vite, absorbé par le nouvel être
                                                                                                                  vivant, pour les besoins de sa nutrition. Dès
                                                                                                                  que la germination est arrivée à sa fin,
                                                                                                                  il faut donc se hâter de tuer la plantule,
                                                                                                                  pour conserver le sucre. On a recours, pour
                                                                                                                  ce meurtre végétal, à l’action de la chaleur.
                                                                                                                    On commence par dessécher la graine ger-
                                                                                                                  mée à une température peu élevée, et on la
                                                                                                                  soumet ensuite à une chaleur de + 80°, qui
                                                                                                                  tue le petit végétal, sans altérer le sucre con­
                                                                                                                  tenu dans la graine germée.
                                                                                                                    Pour effectuer cette opération, on trans­
                                                                                                                  porte le grain germé dans un grenier placé
                                                                                                                  par-dessus le germoir. Là, on l’étend sur
                                                                                                                  le plancher, en une mince couche de 1 déci­
                                                                                                                  mètre de hauteur, et on l’abandonne à lui-
                                                                                                                  même pendant quelques heures, c’est-à-dire
                                                                                                                 jusqu’à ce qu’il ne mouille plus les mains.
                                                                                                                  Alors, on le porte dans la touraille, où il achè­
                                                                                                                  vera de se dessécher dans un courant d’air
                                                                                                                  beau coup plus chaud, qui tuera la plantule.
                                                                                                                    Si l’on nous demande pourquoi l’on n’ex­
                                Fig. 200. — Un des germoirs de l’orge, à la brasserie Fanta, à Sèvres.
                                                                                                                  pose pas immédiatement le grain germé à
                                                                                                                  une haute température, pourquoi l’on com­
                doit dépasser la longueur du grain d’un  les malteurs choisissent. Tout le monde sait             mence par le dessécher à l’air libre avant de
                quart ou de la moitié. C’est vingt-quatre  que la bière préparée avec du malt obtenu              l’exposer à la forte chaleur qui doit tuer la
                heures après l’apparition de la radicelle,  au mois de mars a la préférence des consom­          jeune plante, nous répondrons que si l’on
                que la tigelle apparaît. Elle se montre au  mateurs. C’est ce qu’on appelle la bière de           agissait autrement, si l’on chauffait for­
                même point que la radicelle, mais elle s’en­  mars.                                               tement le grain tout de suite , c’est-à-dire
                gage dans la substance de la graine ramollie,   L’orge, en germant, perd environ 2 pour           au moment où il sort du germoir, et alors
                et se dirige vers l’extrémité opposée. Elle ne   100 de son poids, par suite du dégagement de     qu’il retient encore beaucoup d’eau, on
                tarderait pas à percer cette enveloppe et à  l’acide carbonique, aux dépens de l’oxygène          aurait un véritable empois, qui, se dur­
                sortir du côté opposé de la graine sous la  de l’air et des éléments de la graine. On ne          cissant par la chaleur, serait peu per­
                forme d’une feuille verte, si l’on n’arrêtait  doit donc pénétrer qu’avec précaution dans         méable à l’eau des infusions. Mais si l’on
                pas la germination.                       un germoir, car on y courrait le danger                 a eu la précaution de chasser par l’évapo­
                  La durée de la germination est très-va­  d’asphyxie.                                            ration à une faible température, la plus
                riable. En France, elle est de septà dix jours   Nous représentons, dans la figure 200,           grande partie de l’eau qui humecte le grain,
                en été, et de dix à seize jours à la fin de l’au­  un des nombreux germoirs de la brasserie       on peut ensuite le chauffer impunément
                tomne. Le printemps et l’automne sont plus  Fanta, à Sèvres.                                      jusqu’à + 80° et même 85°. Il ne faut
                                                                                                                                                             Fig. 201. — Coupe de la touraille de la brasserie Fanta,
                favorables à cette apparition que l’été et                                                        pas, toutefois, atteindre + 100°, car à cette             à Sèvres.
               l’hiver. C’est pour cela que l’on ne fait ja­  Il est évident que si l’on abandonnait              température, la diastase qui doit produire   A, foyer.—B, toit en tôle pour arrêter la fumée. — C, treil­
                                                                                                                                                             lage métallique du premier plancher. — D, treillage mé­
                mais germer l’orge ni l’hiver ni l’été. L’au­  la plantule, après la germination de la            la transformation de l’amidon en sucre,    tallique du second plancher.—E, cheminée d'appel. —
                                                                                                                                                             aa, couche d’air isolante pour empêcher le refroidisse­
               tomne et le printemps sont les saisons que  graine, à son développement naturel, le                serait détruite.                           ment. — b,b', conduits d’aérage du foyer.
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