Page 283 - Merveilles Industrie Tome 4
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LE VIN                                     277

       Ils n’empruntent au raisin que leur couleur, j   Comme le bouquet naturel du vin est
       leur arôme, ainsi qu’une partie de leur sucre   toujours insuffisant, on lui communique un
       et de leur alcool. Il est évident qu’avec les  bouquet artificiel, au moyen de diverses in­
       raisins du Midi arrivés à un grand état de   fusions aromatiques.
       maturité, on peut, non-seulement imiter ces   Les infusions aromatiques qui servent à
       uns liquoreux, mais les surpasser, les cépa­  cet usage sont les infusions aqueuses ou
       ges du Midi, quand ils sont bien choisis,   alcooliques, de coques d’amandes grillées,
       n'étant pas inférieurs à ceux de l’Espagne,   de poudre de racine d’iris, de violettes, de
       ni aux plants des îles espagnoles de l’Atlan­  lavande, de thym, de girofle, de cannelle,
       tique, ni à ceux de la Sicile. Et de fait, le   etc. Quelquefois l’éther butyrique ou va-
       madère et le malaga de Cette sont souvent  lérianique est ajouté en faible quantité.
       supérieurs aux vins naturels de Madère et   Pour donner au vin blanc la teinte du
       de Malaga, que ces pays ne produisent,  vin de Madère et de Porto, on emploie
       d'ailleurs, aujourd’hui, qu’en quantité in­  une très-petite quantité de caramel de su­
       signifiante.                              cre. Pour colorer les vins rouges, on em­
         Voici comment on procède à Mèze, à Nar­  ploie la baie de sureau ou la mauve.
       bonne et à Cette, pour fabriquer, avec les   Ces mélanges opérés, il reste à mûrir ou
       cépages du pays, des vins liquoreux sem­  à vieillir ces vins. La chaleur du soleil,
       blables à ceux de l'Espagne, du Portugal,   s’exerçant pendant deux ou trois années,
       de Chypre ou de Sicile.                   donne aux éléments des vins d’imitation
         On prend les cépages produisant des I  l’harmonie, la fusion intime, la résistance
       moûts les plus sucrés et les plus parfumés. ;  au transport, en un mot toutes les quali­
       Ces cépages sont l’alicante, le carignan, la  tés qui assurent la durée et la saveur de ce
       clairette, le chasselas, le terret-bouret, le ,  genre de vins.
       grenache. Comme le terret-bouret est de     Pour opérer plus vite, on place quelque­
       beaucouple plus répandu de tous ces cépages,   fois les tonneaux dans des hangars chauffés.
       c’est le terret-bouret qui sert, dans l’Hérault,   Aujourd’hui, quelques fabricants obtien­
       à cette fabrication. Les négociants de Cette,   nent presque instantanément le vieillisse­
       de Mèze, de Narbonne, envoient leurs ton­  ment de leurs vins en les chauffant dans
       neaux chez le propriétaire, qui leur vend le  les appareils pour le chauffage des vins
       moût du terret-bouret au moment où il sort  construits d’après les principes de M. Pas­
       du pressoir. La fabrication du vin s’opère  teur, appareils que nous décrirons et repré­
       ensuite dans les celliers du négociant.   senterons plus loin, après avoir parlé des
         Après que le vin a subi sa fermentation   maladies des vins. Une température de -j-
       dans le tonneau, on le colle et on le soutire  60° à + 65° suffit à cette opération.
       plusieurs fois, comme le font les fabricants   En résumé, la fabrication des vins d’imi­
       de la Champagne, jusqu’à ce que l’on ait ob­  tation, qui s’exerce sur une si grande échelle
       tenu un vin bien dépouillé. Ce travail exige   dans le département de l’Hérault, est cal­
       plusieurs mois. Au bout de ce temps,, on  quée sur celle des vins exotiques. Comme
       ajoute au vin bien clair le sirop qui provient  les vins d’Espagne et de Sicile, les vins d’i­
       de l’évaporation du moût des raisins amené   mitation sont des vins alcoolisés et sucrés,
       a marquer 90 ou 9o° à l’aréomètre, et on   provenant d’excellents cépages. Si on les
       l’additionne, en outre, d’alcool, de manière  additionne de fortes proportions de sucre et
       a porter le titre du liquide à environ 18° cen-  d’alcool, si on en fait de véritables liqueurs,
       h’simaux.                                 c’est pour répondre au type qu’ont imposé
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