Page 14 - Merveilles Industrie Tome 4
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8 MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.
sa galette. A l’aide de bâtons mouillés, ration du pain, dans certaines parties de
il retirait du feu une pierre chauffée, il la Norwége, d’un procédé qui, d’après la
coulait la pâte de farine et d’eau sur la description qu’il en donne, différait peu de
pierre chaude ; il recouvrait cette pierre celui auquel les premiers hommes avaient
chargée de galette d’une seconde pierre, recours.
retirée de même, et obtenait ainsi une
espèce de galette mince. Au lieu de recom « M. Bartholin, médecin danois, dit Valmont
de Bomare, assure qu’en certains pays de Norwége,
mencer cette opération pour chaque galette,
on fait une sorte de pain qui se conserve pendant
on utilisait la chaleur de la pierre supé quarante ans ; et c’est, dit-il, une commodité, car,
rieure pour couler à sa surface une nouvelle quand un homme de ce pays-là a une fois gagné
de quoi faire du pain, il en cuit pour toute sa vie,
quantité de pâte, que l’on recouvrait comme
sans craindre la famine. Ce pain de si longue du
la précédente, et ainsi de suite. C’est ce que rée est une sorte de biscuit, fait de farines d’orge
représente la figure 4. et d’avoine pétries ensemble, et que l’on fait cuire
On a retrouvé du pain pré-historique dans entre deux cailloux creux. Ce pain est presque in
sipide au goût : plus il est vieux et plus il est sa
les stations lacustres delà Suisse. M. Heer, voureux, de sorte qu’en ce pays-là l’on est aussi
auteur de l’ouvrage « Die Pfahlbauten » friand de pain dur qu’ailleurs on l’est de pain ten
(les Constructions sur pilotis) nous donne, à dre ; aussi a-t-on soin d’en garder très-longtemps
pour les festins, et il n’est pas rare qu’au repas qui
cet égard, les renseignements suivants:
se fait à la naissance d’un enfant, on mange du
pain qui a été cuit à la naissance du grand-père. »
« Si semblable que paraisse au premier abord,
le pain des habitations lacustres à du pain carbo
nisé, il pouvait s’élever de nombreux doutes sur Le procédé de préparation du pain en
la justesse de cette explication, mais ils ont été usage dans les temps pré-historiques s’étart
écartés par l’examen, car, en brisant ces pains, on donc conservé en Europe jusqu’au siècle
a pu constater des restes évidents de glumes et
même des grains de froment très-bien conservés. dernier.
11 en résulte donc que les glumes n’étaient pas en On voit, en consultant la Rible, que ce
levées et que les grains étaient incomplètement même procédé était en usage chez les an
broyés. La masse pilée était probablement amenée
à un état pâteux, et cuite entre des pierres chauf ciens Orientaux. Lorsque Abraham reçut
fées. A en juger d’après la croûte, le pain était la visite de trois anges venant, sous l’ap
probablement mince et déformé aplatie; il offre parence de trois jeunes hommes, lui annon
des pores serrés et petits, plus petits que ceux de
notre pain de froment, et rappelle le pain de sei cer la naissance d’un fils, Sara prépara leur
gle ; seulement on n’a pas encore rencontré le repas, en pétrissant trois mesures de farine
seigle dans les habitations lacustres, et, d’ailleurs, et en faisant cuire la pâte dans le foyer.
les grains qu’on trouve dans le pain sont bien des Dans cette espèce de galette, faite de
grains de froment ; mais on ne connaissait pas
alors l’art de faire lever le pain. » farine mouillée, puis cuite au four, les
éléments de la farine ne subissaient pas de
Il ne faudrait pas croire que ces procé modification essentielle. La pâte n’était pas
dés primitifs de panification appartiennent soumise à la fermentation.
exclusivement aux âges pré-historiques et L’usage du levain remonte cependant à
aux peuples sauvages. Ils subsistaient en une haute antiquité. Dans toutes les lan
core, au dix-huitième siècle, chez des popu gues sémitiques, on retrouve le mot Kho-
lations civilisées. metz, qui a pour racine Khamets, dont la
Valmont de Romare, célèbre naturaliste signification est ferment.
du siècle dernier, nous apprend, dans son On lit dans VExode (récit de la fuite en
Dictionnaire dhistoire naturelle, qu’au Egypte), que les Hébreux, forcés de par
xvme siècle, on se servait, pour la prépa tir précipitamment, n’avaient pas eu le