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LE FROID ARTIFICIEL.                                607


          Un réservoir en bois avec des cloisons ver­  la volatilisation de l’éther pour la fabrica­
        ticales, dans lequel circulait lentement la   tion artificielle de la glace, un physicien
        dissolution saline froide envoyée par une   français, M. Ferdinand Carré, poursuivait,
        pompe, était placé près de l’appareil. A la   de son côté, le meme problème. 11 avait,
        sortie du réservoir, cette solution revenait   d’ailleurs, été devancé dans cette même voie
        d’elle-même, dans le bac qui entourait la   par un constructeur français, M. Rizet, mais
        chaudière. L’eau à congeler était placée dans   on manque de détails sur les résultats ob­
        des caisses prismatiques en zinc, qui plon­  tenus par cet opérateur.
        geaient dans le bac où circulait la solution   Le 27 juin 1857, M. Ferdinand Carré
        de sel marin. Dès que cette eau s’était prise   prenait un brevet pour la construction d’un
        en blocs de glace, on retirait les caisses de   appareil servant à la fabrication de la glace
        zinc pour les remplacer par de nouvelles   au moyen du froid produit par l’évaporation
        pleines d’eau à congeler.                 de l’éther sulfurique. L’appareil présentait
          La glace obtenue avec la machine de     une série de combinaisons mécaniques et
        James Harrisson et Siebe était dure, mais   physico-chimiques tellement justes que rien
        opaque et d’un aspect laiteux. Cet aspect   ne pouvait porter obstacle à la marche de
        provenait des bulles d’air qui se dégagent   l’opération.
        de l’eau au moment où elle se solidifie.    L’appareil de M.. Ferdinand Carré fut
          On obtenait, à chaque opération, 8 à 10 ki­  soumis, en 1860, à des expériences publiques,
        logrammes de glace. Le plus grand modèle   devant une foule de curieux et de savants,
        produisait 10,000 kilogrammes par vingt-   qui furent tous frappés des avantages de ce
        quatre heures. Les modèles intermédiaires,   système,
        pour une force de 24 chevaux, produisaient   11 y avait cependant un inconvénient
        5,000 kilogrammes par vingt-quatre heu­   grave à cet appareil. Outre que l’éther n’ab­
        res ; les petits, comme celui qui figurait à   sorbe, en se vaporisant, que cinq fois et demi
        l’Exposition de Londres, 1,000 kilogrammes   moins de chaleur latente que l’eau, l’inflam­
        par vingt-quatre heures. Ces derniers appa­  mabilité de l’éther était un sérieux inconvé­
        reils ne contenaient pas moins de 145 kilo­  nient, ces vapeurs pouvant prendre feu à la
        grammes d’éther.                          suite d’une fuite accidentelle. 11 était indis­
          Les frais de production de la glace va­  pensable, pour que l’appareil pût s'appli­
        riaient selon les circonstances. Une machine   quer à l’industrie en toute sécurité, de
        de la force de 15 chevaux-vapeur, qui fonc­  trouver une substance volatile qui ne fût pas
        tionna à Liverpool en 1860, contenait 400   inflammable. M. Ferdinand Carré trouva le
        litres d’éther, et donnait à peu près 2 tonnes   corps cherché dans l’ammoniaque. Le 24 août
        déglacé, que l’on vendait 10 centimesle kilo­  1859, il prit un nouveau brevet pour une
        gramme, c’est-à-dire à un prix moins élevé   modification à son premier appareil dans
        que la glace naturelle.                   lequel l’ammoniaque liquide remplaçait l’é­
          11 y avait dans cette machine une certaine   ther sulfurique.
        perte d’éther, mais celte perte correspon­  Dans ce brevet, M. Ferdinand Carré, après
        dait seulement à 1/2 kilogramme de glace   avoir rappelé les principes physiques de la
        par vingt-quatre heures, c’est-à-dire à en­  production du froid par la vaporisation des
        viron 1/7 pour 100.                       liquides, décrit une série d’appareils modi­
                                                  fiés ou nouveaux, qui donnent au pro­
          Pendant que les constructeurs anglais et   blème qu’il avait abordé une solution plus
        américains cherchaient à rendre pratique   étendue.
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