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INDUSTRIE DE L’EAU.                                389

        en plein soleil, les planches de légumes et   Marseille; d’avoir su reconnaître quel ser­
        d’arbres fruitiers, les plates-bandes et les   vice on lui rendrait, si on lui donnait as­
        massifs de fleurs. Partout circule la rigole   sez d’eau , non pas seulement pour boire,
        d’eau. En ouvrant une petite vanne, dissi­  mais pour rendre ses rues salubres, assai­
        mulée sous le gazon, on livre l’eau à la soif   nir son port, arroser ses alentours, et faire
        du terrain. Les abris sont inutiles sous ce   pousser la verdure où il n’y avait jamais eu
        climat; on n’en établit guère que contre le   que des rochers desséchés, friables et ré­
        vent, en plantant des murs de cyprès très-   pandant, au moindre vent, une poussière
        rapprochés. L’espalier résulte de la dispo­  insupportable; c’est enfin d’avoir porté la
        sition naturelle des lieux, et on obtient alors   conviction dans l’esprit des administrateurs
        le climat de l’Afrique.                   de Marseille, et de les avoir décidés à risquer
          A Cannes, sous l’abri de la montagne de   de troubler leurs finances, pour travailler à
        l’Estérel, les orangers viennent en pleine   la prospérité de leur ville dans le présent et
        terre, les palmiers croissent au milieu des   dans l’avenir.
        jardins et les aloès forment les buissons des   Le trouble apporté dans les finances de
        haies. A GraSse, à l’abri des montagnes des   Marseille, par la construction du canal de la
        Alpines, les fleurs propres à la parfumerie,   Durance, n’a pas été, d’ailleurs, de longue
        les roses, les tubéreuses, les jasmins, les ré­  durée. Le canal a coûté 60 millions, et
        sédas, se cultivent par hectares, comme on   la vente des eaux rapporte déjà à la ville
        cultive dans le nord le colza, l’œillette et la   plus d’un million par an. Marseille n’a
        pomme de terre. Quand elle est arrosée, la   donc pas fait une mauvaise affaire, et elle a
        végétation du Midi est d’un aspect splen­  réalisé, avec sa distribution d’eau, une des
        dide. La lumière se reflète sur des feuilles   plus remarquables créations de l’art de l’in­
        et des fleurs d’une grandeur, d’une vigueur   génieur, en même temps qu’elle a édifié,
        de tons inconnue dans le Nord, car le tissu   avec l’aqueduc de Roquefavour, un des plus
        et la matière colorante se développent en   utiles et des plus beaux monuments des
        raison de l’intensité des rayons solaires.   temps modernes.
        Quand on regarde Marseille des hauteurs
        de Mazargues, la vue de ce panorama de
        verdure, de pavillons, de jardins, qui ne s ar­
        rêtent qu’à la mer, cause un plaisir inex­
                                                             CHAPITRE XLII
        primable, surtout quand on se rappelle l’an­
        cienne aridité de ces mêmes lieux, aspect
                                                  LES EAUX PUBLIQUES A TOULOUSE. — PROJETS ANTÉRIEURS
        que l’on retrouve, d’ailleurs, dans la partie   A LA DISTRIBUTION D’EAU DE LA GARONNE, EXÉCUTÉE EN
        de la banlieue non encore arrosée. On voit   1823 PAR MASQUELEZ ET d’aUBUISSON. — ÉTAT ACTUEL
                                                    DU SERVICE DES EAUX A TOULOUSE.
        la sécheresse, l’aridité, la nudité, fuir devant
        les rigoles d’eau, comme l’ombre fuit à l’ap­
        proche des rayons du jour.                  Avant l’année 1823 l'eau potable man­
          Ce qui fera la gloire de Montricher, c'est   quait aux habitants de Toulouse. Quelques
        d’avoir compris de quelle importance il   sources apportaient seules une quantité in­
        était d’amener une rivière d’eau pure dans   suffisante d’eau. De nombreuses tentatives
        une grande ville, constamment brûlée par   avaient pourtant été faites pour obtenir un
        le soleil, et qui n’avait aucun moyen de désal­  service régulier de bonnes eaux ; mais comme
        térer ni ses habitants ni son sol; c’est d’a­  il est arrivé souvent pour les villes traversées
         voir envisagé dans son avenir la situation de   par un fleuve, deux systèmes rivaux étaient
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