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16 MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.
des corps, en même temps qu’à leur syn rience aussi importante exécutée d’une ma
thèse. nière plus ingénieuse et plus élégante. Et
C’est comme instrument d’analyse chi cette expérience c’est l’électricité qui en fait
mique que la pile de Volta intervint pour les frais de l’une et de l’autre part. Grâce au
établir aux yeux de tous la véritable compo courant électrique qui décompose l’eau, la
sition quantitative de l’eau. proportion en volume des deux gaz qui con
A peine la Lettre de Volta au président de stituent l’eau est rendue sensible, et la véri
la Société royale de Londres était-elle ren fication suit immédiatement la conjecture,
due publique, que deux expérimentateurs puisque en recombinant ces deux volumes
anglais, Nicholson et Carlisle, eurent l’idée de gaz par l’électricité, il ne reste aucun
de faire arriver dans de l’eau les deux fils résidu.
métalliques constituant les pôles d’une pile Nicholson et Carlisle obtinrent au pôle
à colonne. Une légère odeur de gaz hydro positif, soixante-douze parties en volume,
gène se manifesta aussitôt. Ce simple signe d’oxygène, et au pôle négatif, cent quarante -
suggéra à Nicholson et à Carlisle la pensée trois parties en volume, d’hydrogène. Ainsi
de répéter l’expérience sur de l’eau conte donc, à un grain près sur cent quarante-
nue dans un tube fermé à chacune de ses quatre, les volumes se trouvaient dans le
extrémités par un bouchon de liège, les rapport de un, à deux. Ce rapport fut, en
fils métalliques des extrémités de la colonne effet, adopté dès lors, et avant même que
traversant, chacun, l’un des bouchons, et Gay-Lussac l’eût rigoureusement établi par
étant placés dans cette eau, vis-à-vis l’un une autre méthode.
de l’autre. Malheureusement, un accident qui accom
Un dégagement de bulles se fit aussitôt pagnait cette belle expérience, vint en com
dans l’eau, autour de chacun des deux fils pliquer les résultats. Nicholson et Carlisle
métalliques, en employant pour ces fils (et dans le même temps Cruikshank ainsi
un métal non oxydable, tel que le platine. que d’autres observateurs) reconnurent qu’il
Au bout d’un certain temps, les deux tubes se développait dans cette expérience autre
étaient vides d’eau, ou plutôt ils étaient chose que de l’oxygène et de l’hydrogène.
remplis chacun d’un gaz sans couleur, qui On voyait se former un acide et un alcali;
n’était autre chose que de l’hydrogène d’un car les teintures végétales étaient rougies
côté, de l’oxygène de l’autre. au côté positif et verdies au côté négatif.
Il suffisait de réunir les deux gaz et de De là naquirent nombre de discussions con
les enflammer par une étincelle électrique, fuses, qui élevèrent passagèrement des
pour les voir disparaître, en formant de l’eau. nuages contre une expérience qui, sans cette
Ainsi, d’une part, on avait un spectacle circonstance, aurait paru tout à fait décisive.
qui fut refusé à Lavoisier : celui d’obtenir
à la fois, et dans des vases séparés, les deux « La composition de l’eau n’était pas encore uni
versellement admise, écrit M. Dumas; quelques
éléments de l’eau, c’est-à-dire les gaz oxy
esprits faux s’obstinaient à la nier. Les expériences
gène et hydrogène, et d’autre part, on de Lavoisier l’avaient cependant si nettement établie,
avait l’avantage de réunir successivement, et que I on a peine à concevoir les travers dans lesquels
tombèrent plusieurs savants à cette occasion. Bref,
avec le moins possible d’embarras ou d’ap
il fallut un des plus grands génies qui aient cultivé
prêt, deux opérations des plus originales et la chimie pour dissiper les nuages qu’avaient lait
des plus neuves : la décomposition et la re naître les résultats de l’action delà pile sur l’eau (I). >.
composition de l’eau.
(1) Leçons de philosophie chimique, in-8. Paris, 1'37,
11 serait difficile d’imaginer une expé page 399, II' leçon.