Page 194 - Les merveilles de l'industrie T3 Web
P. 194

192                  MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.


                    à celui des eaux minérales se fait avec des   nérales. 11 attribue à certaines sources mj.
                    nuances insensibles, inappréciables à notre   nérales des propriétés exagérées et même
                   jugement, et l’on ne saurait prétendre assi­  ridicules. Il raconte, par exemple, que dans
                    gner des limites qui, en réalité, n’existent pas.  la Béotie, près du fleuve Orchomène, on
                      Mais s’il est impossible de donner une   trouve deux sources minérales, dont l’une
                    définition rigoureuse des eaux minérales,   a la vertu de fortifier la mémoire, et l’autre
                    il faut ajouter que l’usage et la pratique   la propriété de l’affaiblir. 11 dit ailleurs qu’il
                   ne se trompent pas à cet égard. Personne   y a dans la Cilicie une source qui donne
                    n’hésite sur la catégorie dans laquelle il   de l’esprit, et une autre, dans l’île de
                    faut ranger telle ou telle eau. Pour tout le   Cos, qui rend stupide ; enfin que la fon­
                   monde, l’eau de Plombières et de Mont-     taine de Cupidon, à Cyzique, guérit de l’a­
                    Dore est une eau minérale, bien qu’elle   mour !
                    renferme très-peu de principes solubles, et   Quand on pratique des fouilles sous le sol
                    on ne donnera jamais le nom d’eau miné­   de quelques-unes de nos stations thermales
                    rale à l’eau d’un puits, bien qu’elle tienne   actuelles, on y découvre des vestiges de
                    en dissolution plus d’un gramme de ma­    constructions romaines, ou gallo-romaines,
                    tières salines.                           qui prouvent que les anciens consacraient
                      Pour définir les eaux minérales, il faut   ces eaux à la cure des maladies
                    donc se contenter d’un degré relatif d’exac­  A Aix en Savoie, on voit encore debout
                    titude. Sous ce rapport, la définition qu’a   de beaux monuments romains qui attestent
                    donnée M. Jules Lefort, dans son Traité de   que ces thermes étaient très-fréquentés il
                    chimie hydrologique, est la plus satisfaisante.   y a douze ou quinze siècles. La figure 81 re­
                    « On doit entendre par eaux minérales, dit   présente VArc romain d’Aix, en Savoie, reste
                    cet auteur, toutes celles qui, en raison, soit   des constructions qui furent élevées dans ces
                    de leur température, bien supérieure à celle   thermes par l’empereur Gratien. A Luxeuil,
                    de l’air ambiant, soit de la quantité et de la   à Plombières, à Vichy, ainsi que dans quel­
                    nature spéciale de leurs principes salins et   ques stations thermales de l’Allemagne, on a
                    gazeux, sont, ou peuvent être employées   retrouvé les canaux qui servaient à la dis­
                    comme agents médicamenteux. »             tribution de l’eau minérale du temps des
                      L’emploi thérapeutique des eaux minéra­  Romains.
                    les remonte à l’antiquité. Dès l’origine de   L’exploitation des eaux minérales est une
                    la médecine, on reconnut, chez les Orien­  branche importante de l’industrie moderne.
                    taux, chez les Grecs et les Romains, l’action   Elle met en mouvement dans divers pays de
                    puissante que certaines eaux naturelles exer­  l’Europe une quantité considérable de ca­
                    cent sur l’économie animale, ainsi que le   pitaux. En conséquence, nous croyons de­
                    parti qu’on peut en tirer pour le traitement   voir donner un exposé concis des questions,
                    et la guérison des maladies. Les anciens   tout à la fois scientifiques et industrielles,
                    faisaient usage des eaux minérales, en bains   qui se rapportent aux eaux minérales.
                    et en boisson.                             Nous examineronsces eaux, d’abord au point
                      Homère parle de sources d’eaux minérales   de vue de leurs propriétés physiques, ensuite
                    froides et chaudes. Hippocrate fait mention   de leurs caractères chimiques. Après avoir
                    des eaux minérales, quoiqu’il n’en fasse pas   traité la question de la classification des eaux
                    l’application au traitement des maladies en   minérales, et adopté la division qui nous sem­
                    particulier. Pline, dans son Histoire natu­  ble la plus rationnelle et la plus pratiqua
                    relle, s’étend sur les propriétés des eaux mi­  nous passerons rapidement en revue leS
   189   190   191   192   193   194   195   196   197   198   199