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148 MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.
d’une végétation nouvelle, et ainsi se maintient le Dans ce but on les a répandues, en manière
cycle de la vie.
d’engrais, sur des terrains cultivés.
« Partout où la nature n’est pas entravée, la terre
reçoit, absorbe et consomme les déjections de la vie On possède les données suivantes sur la
animale et les emploie au profit de la vie végétale. composition chimique des eaux des égouts
C’est donc dans le sol, et non dans nos fleuves et nos
de Paris.
rivières qu’il faut enfouir ces résidus de la vie ani Un mètre cube de l’eau de ces égouts, qui
male, qui, dans les eaux, deviennent une source
de putréfaction et de mort, aux dépens du sol qui l’on nomme communément eaux vannes,
les réclame, tandis que dans la terre ils sont une renferme environ 3 kilogrammes de subs
source de fécondité et de vie. tances diverses, tenues en suspension ou en
« Répandre sur les terres cultivées les immondices,
les déjections des égouts et de l’industrie, tel est dissolution. Ces matières sont des produits
le système nouveau qu’il faut substituera celui qui azotés, de l’acide phosphorique, des alcalis
est en vigueur aujourd’hui. »
et des matières organiques et terreuses. Le
dépôt qui se forme naturellement dans ces
Dans les dernières lignes de son Rapport, eaux conserve la moitié de l’azote, tout l’a
M. Félix Boudet fait allusion à la méthode cide phosphorique, ainsi que la presque to
nouvelle qui est expérimentée depuis plu talité des matières organiques et terreuses.
sieurs années dans les plaines d’Asnières et L’eau, séparée du dépôt, a une couleur
de Gennevilliers, pour tirer parti des eaux blonde; elle retient la moitié de l’azote et la
d’égouts et les consacrer aux irrigations fer moitié des alcalis. Sur 1000 parties de dépôt,
tilisantes. On nous saura gré de donner ici il y en a 7 d’azote, 7 d’acide phosphorique,
quelques explications sur cette importante 227 à 259 de matières organiques, et 759 à
entreprise. 727 de terre. La valeur de ces eaux brutes
L’égout est sans doute le réservoir com est évaluée à 10 centimes le mètre cube, et
mun, indispénsable à l’assainissement d’une
l’engrais qu’elles donnent à 18 francs la
ville; il déverse dans la rivière tous les dé tonne. Ainsi, les 200 millions de litres qui
tritus, toutes les matières dissoutes ou en se rendent tous les jours dans la Seine, re
suspension qu’entraînent les eaux ; mais l’é
présentent une valeur de 7 millions et demi
gout a deux graves inconvénients : des quan par année.
tités considérables de matières, qui fourni Deux moyens se présentent pour utiliser
raient un excellent engrais, sont perdues les eaux d’égouts. Le plus simple est l’em
pour le sol, et les pays situés en aval de ploi de ces eaux en nature, l’irrigation ordi
l’embouchure sont plus ou moins incom naire. Le second moyen rentre dans la
modés ou infectés par une eau impure, qui fabrication des engrais : il consiste à préci
exhale quelquefois des miasmes pestilentiels.
piter les matières étrangères à l’eau, et à se
Ainsi l’eau et l’air, ces deux agents essentiels servir de ce précipité sec comme engrais.
à la vie, sont altérés par des matières
dont l’agriculture pourrait tirer un utile « Les deux procédés n’en font qu’un, dit M. Mille,
profit. ingénieur de la ville de Paris; ils ne diffèrent que
parle temps employé. La voie naturelle est lente,
Ce système est en usage dans les deux plus
mais elle utilise tout ; la voie industrielle est ra
grandes villes de l’Europe : Londres etParis. pide, mais elle exige des sacrifices d’argent, qui ne
Dans ces deux villes on a donc tous les incon seront pas moindres qu’un centime par mètre cube.
vénients des égouts. On s’est récemment La séparation d’ailleurs est impossible, et le succès
est un régime qui développerait la distribution en
occupé de remédier à ce fâcheux état de s’appuyant sur l’épuration. »
choses. A Paris et à Londres on a cherché à
utiliser les eaux d’égouts pour l’agriculture. Un premierchamp d’expériences fut établi