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144 MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.
les villes situées en aval de Paris ne man produits de matières fécales, etc., etc.
queront pas, à un moment donné, d’accen On voit par ce document irrécusable que
tuer plus énergiquement leurs justes récla l’eau de la Seine, en 1875, n’est plus celle
mations. Si les poissonseux-mêmes pouvaient dont on vantait au siècle dernier la par
se plaindre, ils le feraient, caron trouve sur faite pureté. Ce n’est donc pas sans raison
les rives du fleuve de nombreux poissons as que l’on a substitué à cette eau devenue
phyxiés. impure et fétide (au moins à sa sortie de
M. le docteur Gérardin, inspecteur des Paris) les eaux pures et salubres des sources
établissements insalubres du département de la Dhuis et de la Vanne, que l’admi
de la Seine, a publié un travail sur \'al- nistration municipale a fait dériver à grands
tération des cours d'eau qui a obtenu, en frais, des coteaux de la Champagne, ainsi
1874, un des prix annuels de F Académie que nous le raconterons, avec les détails né
des sciences de Paris. M. le docteur Gérardin cessaires, dans le chapitre qui sera consacré
a plusieurs fois examiné au microscope à l’histoire et à la description des eaux pu
l’eau de la Seine prise après le débouché bliques de Paris.
des égouts, et il a fait des observations très- La présence de matières putrides dans
curieuses sur le dépôt de ces matières dans l’eau de Seine peut être décelée d’une ma
le lit du fleuve et sur ses berges. 11 a remar nière indirecte, pour ainsi dire, en consta
qué, par exemple, que les objets entraînés tant que cette eau, dans son parcours de
par l’égout se déposent dans un ordre mé Paris, est privée de ce gaz oxygène qui est
thodique sur une grande longueur. Les sa l’indice de la pureté des eaux courantes.
bles, les poils, les lambeaux d’épidermes, L’absence de l’oxygène d’une eau prouve,
les trachées végétales isolées par la diges indirectement mais sûrement, la présence
tion, ont tous des points particuliers où ils de matières en décomposition dans sa
se rassemblent presque exclusivement. Il est masse. Or, cette preuve a été donnée par
un point des rives de la Seine, près de l’analyse chimique.
Saint-Ouen, qui pourrait s’appeler, selon M. Félix Boudet a exécuté avec M. Gérar
M. Gérardin, l’z/e des poils, car il s’est din, en 1874,une séried’analyses chimiques
formé là un véritable banc, par l’agglomé des gaz recueillis dans l’eau de la Seine,
ration des poils d’animaux de toute pro en s’attachant particulièrement à doser la
venance entraînés par les égouts, et qui, quantité de gaz oxygène. MM. Boudet et
par une sorte d'affinité élective, se sont Gérardin ont trouvé que le gaz oxygène, qui
réunis tous en ce lieu. Les sables s’accu existe en amont de Paris en quantité nor
mulent dans d’autres points de la rive. male, diminue graduellement de Corbeil à
M. Gérardin a bien voulu dessiner, pour Asnières, Saint-Denis, etc., pour reprendre
les Merveilles de l'industrie, une vue mi son chiffre normal à Rouen seulement.
croscopique exacte des corps étrangers qui Voici les chiffres fournis par l’analyse :
se voient dans l’eau de la Seine puisée entre En amont de Corbeil, on a trouvé 9 centi
Asnières et Saint-Ouen. Ce dessin (fig. 67) litres d’oxygène par litre ; à 1,500 mètres en
fait le 15 février 1875, à un grossissement aval, 8,7 ; àChoisy-le-Roi, 7 1/12 ; à Ivry, 8;
de 600 diamètres, montre quelles sont les au pont de la Tournelle, 8 ; au viaduc d’Au-
matières organiques et minérales que l’eau teuil, 6; à Billancourt, 5; à Sèvres, 5,4; à
de la Seine roule en aval de Paris : des Saint-Cloud, 5,3 ; à Asnières, 4,6 ; au pont
fragments de cellules végétales, des poils de Saint-Ouen, 4; à Saint-Denis, 2; à la
et des cheveux, des animalcules divers, des Briche, 1; à Epinay, 1; à Argenteuil, t,4;