Page 32 - Les merveilles de l'industrie T1
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26                    MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.

                        Ces gouttes de verre, étant subitement re­  ou un morceau de verre, l’équilibre se rompt
                     froidies par le contact de l’eau, se solidifient   et la fiole vole en éclats. Toutefois les frag­
                     à l’extérieur, alors que leurs parties intérieu­  ments sont beaucoup moins nombreux que
                     res sont encore en fusion. Dès lors, la partie 1  dans le cas de la rupture des larmes batavi­
                     refroidie est dans un véritable état de ten­  ques.
                     sion, et elle exerce sur l’enveloppe un effort   Quand on visite une verrerie par instruc­
                     considérable. Cette tension est tout inté­  tion ou par curiosité, les ouvriers ne man­
                     rieure, car les larmes bataviques peuvent   quent pas de vous offrir une de ces fioles
                     subir sans se briser une pression et même   philosophiques, que l’on désigne quelquefois
                     un choc. Mais si l’on vient à détruire la so­  sous le nom A'harmonica, parce que la mince
                     lidarité établie entre toutes les particules du   surface de la calotte aplatie fait entendre un
                     verre de la goutte refroidie, en cassant, par   son harmonieux, quand on souffle légère­
                     exemple, son extrémité, toute la masse éclate   ment le long de sa surface.
                     aussitôt avec bruit et vole en éclats. C’est une   Le verre non recuit se fend et se casse aisé­
                     expérience que l’on ne manque jamais de    ment quand on lui fait subir un brusque chan­
                     faire dans les cours de physique et de chimie. ! gement de température. Les verriers mettent
                        Un effet du même genre se produit avec un ;  constamment cette propriété à profit pour sé­
                     objet de verre que l’on appelle fiole philoso- \  parer de leur canne les objets soufflés, pour
                     phique. Ces fioles ne sont autre chose que ’  fendre les manchons de verre, ainsi que pour
                     les épreuves que font les verriers avec le   détacher le verre qui adhère à leurs outils.
                     verre en fusion, pour connaître sa couleur.   A cet effet, ils touchent avec un fer froid l’ob­
                     A cet effet, l’ouvrier prend au bout de sa   jet de verre encore brûlant dans les points ou
                      canne, dans le creuset, une petite masse de   bien suivant la ligne où ils veulent détermi­
                      verre, la souffle, puis il aplatit la calotte de !  ner la rupture, puis ils le cassent aisément,
                      la sphère, de manière à lui donner la forme ci-  au moyen d’un coup sec, c’est-à-dire brusque.
                      contre, et il la laisse refroidir à l’air.  Tous les verres sont durs à la température
                                                                ordinaire ; mais cette dureté varie avec leur
                                                                composition. Les verres à base de potasse
                                                                sont les plus durs. Après eux, viennent les
                                                                verres à base de soude. Le cristal, qui est
                                                                beaucoup moins dur, se taille bien plus faci­
                                                                lement que les verres proprement dits.
                                                                  Le verre est flexible et élastique ; après
                                                                avoir fait preuve de flexibilité, il revient à sa
                                                                forme première, quand la cause qui avait pro­
                                                                duit sa déformation disparaît. Toutefois,
                                                                M. Péligot a observé sur une lame de verre,
                                                                que ce retour à la forme primitive n’a pas
                                                                lieu quand la cause persisté trop longtemps.
                              Fig. 14. — Fiole philosophique.
                                                                  « Le verre est compressible, dit M. Bontemps (1),
                        Le verre de cette fiole se trouve dans un
                                                                car si ou laisse tomber une bille de verre sur un plan
                      état d’équilibre forcé, comme dans les larmes   uni, garni d’une légère couche d’huile, la balle re­
                      bataviques. Un choc extérieur n’amènerait   bondit en laissant une empreinte d’autant plus large
                                                                que le choc a été plus fort, ce qui prouve que la balle
                      pas sa rupture ; mais si l’on projette dans son ।
                      intérieur un corps dur, par exemple une bille '   (1) Guide du verrier.
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