Page 180 - Les merveilles de l'industrie T1
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POTERIES, FAÏENCES ET PORCELAINES 175
session. Malgré cela, Sir FrancisDavis croyait rien autre chose, sinon qu’à une époque très-
à la haute antiquité des petits flacons chinois reculée il avait existé des relations de com
décrits par M. Rosellini. merce suivies entre la Chine et l’Égypte.
La découverte de ces flacons fit une grande Dionysius Lardner, le savant professeur
sensation parmi les archéologues anglais. qui a tant contribué, il y a trente ans, à la
vulgarisation des sciencesen Angleterre, sou
« Parmi les nombreuses bouteilles trouvées dans
les tombes de Thèbes, dit Sir J. Gardner Wilkin tint, dans son Muséum des sciences et des arts,
son dans son grand ouvrage sur les Moeurs et cou
que les découvertes de Rosellini et de Wil
tumes des anciens Égyptiens (I), il n’en est pas qui
aient plus excité la curiosité que celles de fabrication kinson « démontraient suffisamment la con
chinoise qui présentent des inscriptions dans cette naissance de la fabrication de la porcelaine
langue. La découverte accidentelle d’une seule de en Chine, ainsi que l’existence de communi
ces bouteilles pourrait passer inaperçue ou être attri cations entre ce pays et l’Égypte. »
buée à quelque hasard qui l’eût fait déposer par un
voyageur venu récemment à la recherche des objets Mais les sinologues devaient ici confondre
précieux que renferment ces tombes ; mais cette ex les archéologues. A propos de cette discus
plication ne peut être admise lorsqu’on trouve ces mê sion, M. Stanislas Julien rappela que les
mes bouteilles dans plusieurs tombes égyptiennes. »
Chinois ont successivement fait usage de
Trois de ces petites bouteilles figurent dans six sortes d’écritures, dont on connaît l’ori
le musée Egyptien du Louvre. En invoquant j gine et la date approximative. Or, les signes
cette découverte, certains archéologues pré chinois tracés sur les petites bouteilles ap
tendirent que, puisque l’on trouvait des vases partiennent à la quatrième sorte d’écri
de porcelaine dans les tombeaux de Thèbes, ture, qui n’a été inventée que vers l’an
la porcelaine avait dû être fabriquée par les née 45 avant Jésus-Christ, et qui est encore
Égyptiens dix-huit siècles avant Jésus-Christ. en usage de nos jours (f).
Si on leur objectait qu’aucun historien n’a Ce n’est pas tout, M. Medhurst, interprète
jamais fait mention de la porcelaine égyp du gouvernement anglais à Hong-Kong,
tienne, et que d’ailleurs, on n’a trouvé en fit faire des recherches par des Chinois in
Égypte aucun spécimen d’objets en por struits qu’il employait comme secrétaires,
celaine dans les siècles suivants, nos érudits et ceux-ci furent assez heureux pour retrou
répondaient que la civilisation avait subi en ver l’inscription du premier de ces flacons
Égypte de nombreuses intermittences, et dans les écrits d’un poète chinois qui vivait
qu’il fallait admettre que l’art de fabri vers l’année 740 après Jésus-Christ, et l’in
quer la porcelaine avait été un secret reli scription du second dans une petite pièce
gieusement gardé dans les temples, et que de vers qui date de la même époque.
ce secret s’était perdu à l’époque d’une de Ainsi les inscriptions étaient tracées en
ces perturbations qui étaient si fréquentes caractères relativement modernes, et leur
dans les dynasties de l’Égypte. texte était tiré d’ouvrages écrits au vme siècle
D’autres archéologues soutinrent une opi de notre ère. Cette double découverte mit
nion mixte. Ils prétendirent que les petits fin à toute polémique.
vases de porcelaine dont les musées se dis Voici, d’ailleurs, un fait qui rapproche
putaient la possession, étaient sans doute singulièrement de notre époque les flacons
d’origine chinoise, mais que leur découverte
dans les tombeaux de Thèbes ne prouvait
(1) Histoire et fabrication de la porcelaine chinoise, ou
vrage traduit du chinois par M. Stanislas Julien, accompa
(lj Manners and customs of the ancient Egyptians, by gné de notes et d’additions par M. Alphonse Salvetat, et
J. Gardner Wilkinson ; 3 vol. in-8». London, 1837 ; t. III, augmenté d’un Mémoire sur la porcelaine du Japon, traduit
pages 10'1-109. du japonais par le docteur Hoffmann. 1 vol. in 8. Paris, 1856.