Page 178 - Les merveilles de l'industrie T1
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POTERIES, FAÏENCES ET PORCELAINES.                             173

               « Allez, cherchez en où vous pourrez en trouver,   les mœurs des enfants d’Abraham. Il leur
              et néanmoins on ne diminuera rien de vos ouvrages.
               « Et le peuple se répandit donc dans toute l’Égypte,   fallut alors des idoles, des idoles visibles et
             «fin d’amasser des pailles. »              belles, ajouterons-nous, parce qu’ils étaient
                                                        jaloux des dieux et des déesses des Égyp­
                Nous pourrions multiplier ces citations;
                                                        tiens qui parlaient si bien aux yeux. D un
              mais nous nous contenterons d’ajouter que
                                                        autre côté, les Hébreux aimaient le luxe et
             •ce fut la défense de fournir de la paille aux Hé­  la richesse ; ils auraient dédaigné des dieux
              breux, alors qu’on exigeait d’eux chaque jour
                                                        d’argile. Il leur fallait des dieux en or.
             la fabrication de la même quantité de bri­
                                                        Aussi, lorsque Moïse descendit du mont Sinaï,
             ques, qui fut la cause déterminante de
                                                        pour prescrire au peuple juif l’adoration d’un
             ï Exode, c’est-à-dire de leur sortie d’Egypte.  dieu unique, il trouva toute la tribu dansant
                L’adjonction de la paille à la pâte argi­  autour du veau d’or. Ce veau d’or n’était
             leuse avait pour but de donner plus de     rien autre chose que la réminiscence du
              solidité aux briques simplement séchées au
                                                        bœuf Apis, d’après une théogonie entée sur
             soleil. Il est pourtant bon de noter que la   celle des Égyptiens (1).
             ■cuisson des briques au feu était depuis long­
                                                          Mais les prescriptions du Décalogue
              temps connue des Israélites. On lit, en effet,   étaient sévères : les Israélites ne devaient
              au chapitre xi de la Genèse, à propos de
                                                        point faire d’image taillée, ni aucune figure
              la construction de la tour de Rabel :
                                                        pouvant prêter à l’idolâtrie. Les potiers
               « Et comme ces peuples étaient partis du côté de   hébreux durent donc renoncer à fabriquer
             TOrient, ayant trouvé une campagne dans le pays   aucun produit artistique, et s’en tenir à con­
              de Sennaar, ils y habitèrent.             fectionner des objets usuels.
               « Et ils se dirent l’un à l’autre : Allons, faisons des
              briques, et cuisons-les au feu.             Ils se livrèrent à cette fabrication sur une
               « Ils se servirent donc de briques comme de pierres,   grande échelle, si l’on s’en rapporte aux
             •et de bitume comme de ciment. »
                                                        nombreuses allusions que fait l’Ancien Tes­
                Ainsi, à l’époque de leur sortie d’Egypte,   tament aux procédés et aux productions
              époque qui marque la plus haute antiquité   céramiques des Hébreux.
              à laquelle on puisse se reporter quant à ces   Citons d’abord Jérémie.
              peuples, les Hébreux ne savaient pas fabri­
                                                          « Parole qui fut adressée à Jérémie par le Sei­
             quer d’autres produits céramiques que les
                                                        gneur en ces termes : Allez et descendez dans la
             briques, tandis que l’art du potier, comme   maison d’un potier, et là vous entendrez ce que j’ai
             nous l’avons vu, était déjà singulièrement   à vous dire.
             avancé chez les Egyptiens.                   « J’allai dans la maison d’un potier, et je le trou­
                                                        vai travaillant sur sa roue.
                Mais si les Israélites ne pratiquaient pas
             alors l’art du potier avec toutes les ressour­
                                                         (D II n’est peut-être pas sans intérêt de réunir ici quel­
             ces qu’il comportait déjà, ils avaient vu cette   ques données sur le bœuf ou le taureau Apis. On adorait
              fabrication en plein exercice sur les rivages   surtout cette divinité à Memphis, la seconde résidence des
                                                        rois d’Égypte, où l’on voit encore aujourd’hui les ruines de
             du Nil, et après leur sortie d’Egypte ils com­
                                                        plusieurs temples magnifiques, entre autres le temple de
              mencèrent à appliquer les connaissances   Phta, dans lequel le taureau Apis était nourri. La vache qui
                                                        enfantait Apis devait être fécondée par un rayon de la
             techniques qu’ils avaient acquises pendant
                                                        lune. Quant au taureau sacré, il devait être tout noir, avec un
             les temps douloureux de leur esclavage.    triangle blanc sur le front, une tache blanche en forme de
                Le séjour des Hébreux au milieu des     croissant sur le côté, et sous la langue une espèce de nœud
                                                        semblable à un escarbot (insecte ailé de la famille des
             Égyptiens avait donc porté ses fruits. Lors­  coléoptères). Le bœuf Apis ne pouvait vivre plus de
             que Moïse les fit sortir de la servitude, l’art   vingt-cinq ans ; à sa mort on l’ensevelissait dans un puits.
                                                        Le deuil des Égyptiens durait jusqu’à ce que les prêtres eus­
             commençait à entrer dans l’esprit et dans   sent trouvé un successeur au dieu défunt.
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