Page 500 - Les fables de Lafontaine
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498         FABLES. — LIVRE DOUZIÈME
       Qu’en apanage * on voit aux procès attachés, '
       S’offrit de les juger sans récompense aucune,
       Peu soigneux d’établir ici-bas sa fortune *.
       Depuis qu’il est * des lois, l’homme, pour ses péchés, io
       Se condamne à plaider la moitié de sa vie.
       La moitié ? les trois-quarts, et bien souvent le tout.
       Le conciliateur crut qu’il viendrait à bout
       De guérir cette folle et détestable envie *.
       Le second de nos saints choisit les hôpitaux.   15
       Je le loue ; et le soin * de soulager ces maux
       Est une charité que je préfère aux autres.
       Les malades d’alors, étant tels que les nôtres,
       Donnaient de l’exercice au pauvre Hospitalier * :
       Chagrins, impatients et se plaignant sans cesse :   20
       « 11 a pour tels et tels un soin * particulier ;
              Ce sont ses amis. Il nous laisse *. »
       Ces plaintes n’étaient rien au prix * de l’embarras
       Où se trouva réduit l’appointeur * de débats.
       Aucun * n’était content : la sentence arbitrale *   25
              A nul des deux 3 ne convenait ;
              Jamais le Juge ne tenait,
              A leur gré, la balance * .égale.
       De semblables discours * rebutaient l’appointeur.
       Il court aux hôpitaux, va voir le directeur.   30
       Tous deux ne recueillant que plainte et que murmure,
      Affligés et contraints de quitter ces emplois,
      Vont confier leur peine au silence des bois.
      Là, sous d’âpres rochers, près d’une source pure,
      Lieu respecté des vents, ignoré du soleil,     35
      Ils trouvent l’autre saint, lui demandent conseil.
      « Il faut, dit leur ami, le 4 prendre de soi-même.
              Qui mieux que vous sait vos besoins ?
      Apprendre à se connaître est le premier des soins
      Qu’impose à tout mortel la Majesté suprême.    40
      Vous êtes-vous connus dans le monde * habité?
      L’on ne le peut qu’aux lieux pleins de tranquillité :
      Chercher ailleurs ce bien est une erreur extrême.
        3. Des deux adversaires ou partis.— 4. Le prendre : prendre con
      Voir Détermination, 29, g.
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