Page 504 - Les fables de Lafontaine
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S°2           FABLES. — SUPPLÉMENT

            « Dame Souris, lui dit ce fanfaron,         io
                Ma foi *, quoi que je fasse,
         Seul, je ne puis chasser le Chat qui vous menace ;
            Mais, assemblant tous les Rats d’alentour,
            Je lui pourrai jouer d’un mauvais tour. »
            La Souris fait une humble révérence,       15
                Et le Rat court en diligence
         A l’office *, qu’on nomme autrement la Dépense,
                  Où maints rats assemblés
         Faisaient au frais de l’hôte une entière bombance.
                Il arrive les sens troublés,           20
                Et les poumons tout essoufflés.
         « Qu’avez-vous donc? lui dit un de ces rats. Parlez.
        — En deux mots, répond-il, ce qui fait mon voyage,
        C’est qu’il faut promptement secourir la Souris,
                  Car Raminagrobis *                   25
            Fait en tout lieu un étrange * ravage.
                Ce Chat, le plus diable des chats,
        S’il manque de souris, voudra manger des rats. »
        Chacun dit : « Il * est vrai. Sus ! sus ! Courons aux armes ! »
        Quelques rates, dit-on, répandirent des larmes.   30
        N’importe, rien n’arrête un si noble projet ;
                Chacun se met en équipage * ;
        Chacun met dans son sac un morceau de fromage,
        Chacun promet enfin de risquer le paquet.
                Ils allaient tous comme à la fête,     35
                L’esprit content, le cœur joyeux.
                Cependant, le Chat, plus fin qu’eux,
              Tenait déjà la Souris par la tête.
                Ils s’avancèrent à grands pas
                Pour secourir leur bonne amie.         40
                Mais le Chat, qui n’en démord pas,
        Gronde et marche au devant de la troupe ennemie.
                A ce bruit, nos très prudents rats,
                Craignant mauvaise destiné^
        Font, sans pousser plus loin leur prétendu fracas,   45
                Une retraite fortunée :
                Chaque rat rentre dans son trou.
        Et si quelqu’un en sort, gare encor * le Matou !
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