Page 405 - Les fables de Lafontaine
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LE LOUP ET LES BERGERS           401
     Soupçonnant à bon droit le compère, il va vite
     Lui dire : « Apprêtez-vous, car il me reste encor *   25
     Quelques deniers * ; je veux les joindre à l’autre masse *. »
     Le compère aussitôt va remettre en sa place
            L’argent volé, prétendant * bien
     Tout reprendre à la fois sans qu’il y manquât rien.
            Mais, pour ce coup, l’autre fut sage * :   30
     Il retint tout chez lui, résolu de jouir,
            Plus n’entasser, plus n’enfouir 5.
     Et le pauvre voleur, ne trouvant plus son gage *,
            Pensa * tomber de sa hauteur.

     Il n’est pas malaisé de tromper un trompeur ®.   35
       Exercice complémentaire. — Racontez le deuxième voyage du
     « pauvre voleur » au trésor, ses espérances, sa déception, sa confusion.




             5.  — LE LOUP ET LES BERGERS


       Sources. — Esope ; Abstémius ; Haudent.
      Intérêt. — Examen de conscience du loup repentant, dont la
     conversion est brisée net par le scandale des Bergers. La Fontaine
     souligne avec esprit l’humour de ce sujet, mais n’en dégage nulle­
     ment la vraie morale. On devine aisément qui pourraient être
     ces Bergers qui « mangent les animaux », prêchent aux autres « les
     mets de l’âge d’or » et pour qui le loup « n’a tort que quand il
     n’est pas le plus fort ».
            Un Loup rempli d’humanité,
            (S’il en est de tels dans le monde),
            Fit, un jour, sur sa cruauté,
     Quoiqu’il ne l’exerçât que par nécessité,
            Une réflexion * profonde.             ■ 5

      5. Négation, 29, k. — 6. Même alliance de mots à la fin de II, 15 :
     Car c’est double plaisir de tromper le trompeur.
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