Page 385 - Les fables de Lafontaine
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LE MILAN ET LE ROSSIGNOL 381
17. — LE MILAN ET LE ROSSIGNOL
Sources. — Ésope ; Anonyme ; Abstémius ; Haudent. Fable
publiée en 1671.
Intérêt. — L’antithèse entre le Milan et le Rossignol est déve
loppée avec émotion et, en même temps, beaucoup de relief,
aussi bien dans la présentation des personnages que dans le dia
logue. C’est une réplique abrégée, et sur une note plus tendre,
de I, 10, le Loup et l’Agneau, et c’est aussi, pour l’idée morale,
l’exacte contre-partie de III, 12, le Cygne et le Cuisinier. On peut
encore, pour le ton élégiaque, rapprocher de III, 15, Philomèle et
Procné. C’est une fable ornée.
Après que le Milan *, manifeste voleur,
Eut répandu l’alarme * en tout le voisinage
Et fait crier sur * lui les enfants du village,
Un Rossignol tomba dans ses mains *, par malheur *.
Le héraut du printemps1 lui demanda la vie : 5
— « Aussi bien, que manger en qui n’a que le son ?
Écoutez plutôt ma chanson :
Je vous raconterai Térée * et son envie *.
— Qui, Térée? est-ce un mets propre* pour les milans?
— Non pas : c’était un roi dont les feux * violents 10
Me firent ressentir2 leur ardeur criminelle.
Je m’en vais vous en dire une chanson si belle
Qu’elle vous ravira. Mon chant plaît à chacun. »
Le Milan, alors, lui réplique :
— « Vraiment, nous.voici bien! lorsque je suis à jeun, 15
Tu me viens parler de musique!
— J’en parle bien aux rois. — Quand un roi te prendra,
Tu peux lui conter ces merveilles.
Pour un milan, il s’en l'ira.
Ventre affamé n’a point d’oreilles. » 20
Exercise complémentaire. — Supposez que lé Rossignol et
l’Agneau de I, 10, se rencontrent aux Champs-Élysées et se content
leyr aventure. Ils en tirent la morale.
1. Le rossignol. Périphrase, 24, d. — 2. Subir les effets brutaux.