Page 76 - Vincent_Delavouet
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pas l’inspiration alors d’en acheter quelques actions,
                  car d’autres, mieux avisés que moi, obtinrent un intérêt
                  fantastique.




                                     Chapitre XXIV

                                        Tourisme

                    De là, toujours pendant cet hiver 1902-1903, je me rendis
                   dans la Louisiane, moitié en touriste, et quelquefois en
                  offrant de ma bijouterie. La capitale en est Bâton-Rouge,
                  petite ville peu importante ; rien de remarquable.
                    La ville intéressante, sur le Mississipi, est la Nouvelle-
                   Orléans, placée comme Bordeaux, assez loin de la mer, mais
                  avec l’embouchure de ce fleuve assez vaste pour laisser
                  remonter les navires de gros tonnage.
                    Cette ville de 200.000 habitants est essentiellement de
                   mœurs et coutumes françaises. On y parle un vieux français
                   fort réjouissant ; les nègres même parlent notre langue. La
                   fièvre jaune autrefois y demeurait à l’état endémique, mais
                   de grands travaux d’assainissement furent faits et, à l’épo­
                   que où je m’y trouvais, toute trace en avait disparu.
                    Nous parlerons un peu des mœurs du pays et surtout de la
                   distinction bien marquée entre Blancs et Noirs.
                     Si, dans le nord des Etats-Unis, les deux races tendent à se
                   confondre, il n’en est pas de même dans ces régions au sud
                     Là, une ligne de démarcation est nettement tracée. Il y a
                   des restaurants pour les Noirs, qu’aucun Blanc ne fréquente ,
                   dans les trains, des wagons spéciaux sont mis à la disposition
                   des Nègres et il leur est interdit de monter dans d’autres
                   compartiments ; d’ailleurs, ils seraient vite expulsés. Par­
                   tout où se trouve l’homme blanc, le Noir s’abstient de s’y
                   rendre. Us sont considérés comme d’une race inférieure et le
                   fait est que, malgré l’abolition de l’esclavage, ce sont les
                   Noirs qui remplissent les rôles subalternes de domestiques
                   et, quoique d’une mentalité fruste, s’attachent aux maîtres
                   chez lesquels ils sont bien traités. Les négresses surtout
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