Page 61 - Vincent_Delavouet
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         avec un climat doux, tempéré en toute saison, où il est
          reconnu que le soleil brille 310 jours de l’année. La végétation
          y est intensive, et la vie y est douce et à très bon compte.
          Quel changement ! J’en donnerai une faible idée en racon­
          tant mon arrivée à Stockton. J’entrai dans un hôtel conve­
          nable, tenu par un Italien. Je m’informai des prix perçus :
          3 dollars 50 = 17 fr. 50 par semaine, soit 2 fr. 50 par jour ! ! !
          Cela je l’affirme et puis le prouver. Pour ce prix quotidien de
          2 fr. 50, le voyageur a droit à une chambre convenable et à
          trois repas complets par jour, comprenant trois plats de
          viande, poisson, légumes et desserts, avec du pain et même
          du vin à discrétion ! Voilà le pays de cocagne où le hasard
          m’avait conduit. Terre fertile et hospitalière où l’étranger est
          toujours bien accueilli.
           Et cependant, ses habitants sont de pauvres Italiens émi­
          grants, travaillant comme manœuvres pour la plupart,
          aucun propriétaire, mais simples locataires, trouvant le
         moyen d’avoir une basse-cour, un jardinet rempli de légumes
         et de fruits et quelquefois un petit clos de vigne qui leur
         rappelle les vins de leur pays.
           D’autres cultivent en plus grand fruits ou légumes qui
          vont approvisionner le marché de San-Francisco.
           Mais, je reviens à mon histoire et à mes aventures abso­
          lument véridiques et vécues, qui font l’objet de ces «Mémoires*.
           Mon hôtelier m’avait raconté les merveilles de ce pays que
         l’on pouvait comparer à « l’Eden ». Il faut dire que la Cali­
         fornie est le « Jardin » de l’Amérique du Nord, comme la
         Touraine est le jardin de la France. Me sentant un peu d’ar­
         gent en poche, assez rudement gagné d’ailleurs, et voulant
         me reposer le corps et l’esprit pendant quelque temps, je
         résolus de visiter une partie de cette Californie si vantée*
           Ne voulant pas parcourir le pays à pied, l’idée me vint
         de chercher à me procurer une voiture de campement, qui
         devait représenter pour moi une maison portative.
           L’Italien chez lequel je logeai me mit donc en pourparler
         avec un juif brocanteur, mais brocanteur en grand, c’est-à-
         dire achetant et vendant de tout et à tous prix.
           Ce juif possédait une mine d’or épuisée en Sierra Nevada,
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