Page 56 - Decrets mars
P. 56
- n4-
A deux heures et demie, l'huissier annonce le Tribunal.
M. Maréchal s'asseoil au fauteuil de la Présidence, ayant à sa
droite M. Mercier. et à sa gauche M. Jordan, juges.
La parole est à M. Descotes.
Messieurs,
« Lorsque, il y a quelques jours à peine, une dépêche du
Père Frédéric et de son éloquent défenseur vint frapper à la
porte de mon cabinet d'avocat, en même temps, je puis bien
le dire, qu'à la porte de mon cœur de catholique el de citoyen,
j'éprouv:Ji, au milieu des amertumes de l'heure présente, une
des plus grandes et des plus saintes joies de ma vie.
« Il m'est doux de songer que mon humble personnalité avait
pu être l'objet d'une pareille démarche, que les martyrs du
droit et de la liberté, en sollicitant ma modeste collaboration
à leur glorieuse défense, n'avaient point trop présumé de la
sincérité de mes convictions libérales et religieuses et de
l'ardeur de mon dévouement ; et, en répondant sur l'heure
par une acceptation spontanée et sans réserve, je remerciai
Dieu qui allait me fournir l'occasion de léguer à mes enfants
quand j'aurai passé, - comme nous passerons tous, comme
passeront, avec leurs œuvres éphémères, les puissants du
jours ! - le plus pur et le plus .précieux souvenir d'une
existence d'homme et d'une carrière d'avocat!. .. (Sensation.)
• Messieurs, je n'exagère point ! les sceptiques, s'il s'en
trouve dans cet auditoire, pourront, à leur gré, sourire de mes
enthousiasmes, je les leur abandonne! Votre cœur, et cela me
suffit, - car, c'est pour vous seuls que je plaide, - saura
rendre hommage, à leur sincérité! ... Et d'ailleurs ce que je
dis ici, je me sens, grâce au Ciel, ni le seul a r,• penser, ni le
premier à le dire ; je ne suis, moi qu'un soldat obscur dans
cette vaillante légion qui a inscrit sur son drapeau la défense
de nos libertés les plus chères. Ce que je dis ici, cent voix
plus autorisées que la mienne l'ont proclamé avant moi partout
où il y a eu à combattre l'arbitraire et le bon plaisir, sous le