Page 55 - Decrets mars
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     menaces,  à  gauche  des  présents ...  Mais  que  leur  importe'?
     Ils  ne  sont 11i  à droite  ni  à gauche;  la  justice  est  le  flambeau
     qni  seul  éclaire  leur  conscience.
       cc  La  cause de  mes  clients est juste,  elle  prévaudra, j'en suis
     sûr.  » (Sensation  prolongée.)
       En  se  rasseyant sur son banc,  M.  Bordeaux a pu  se convain-
     cre,  au  mouvement  de  son  auditoire,  que  sa  vigoureuse plai-
     doirie,  écoutée  avec  la  plus  grande  attention,  avait  été  un
     grand  soulagement  pour  tontes  les  consciences  indignées  et
    avait  causé  une  véritable  satisfaction  pour le  public  dont,  en
     réalité,  il  avait  plaidé  la  cause  en  plaidant pour les  religieux. Il
    a été promptement récompensé de  sa  belle action par la distinc-
     tion  méritée qne  ses  confrères  <ln  barreau  lui  ont  décernée le
     surlendemain,  en  le  nommant  bâtonnier de  l'ordre des  avocats
    de Thonon ; il  a reçu  un  second  titre  de  gloire,  des  insultes
     mêmes  que  lui  a prodiguées le journal  de  la  sous-préfecture,
    lequel,  en  même  temps,  couvrait d'éloges extravagants l'avocat
     de  la  partie adverse  pour avoir,  dans un  moment d'oubli passa-
    ger,  qualifié d'honorable la  besogne du  serrurier Plantaz.
      L'affaire fut  renvoyée en  référé  pour  être  plaidée,  quant  au
    fond,  à l'audience du  3 décembre  suivant.
      Ce jour-là,  vendredi,  la  salle  du  Tribunal  est  littéralement
    comble;  la  salle  réservée  est  elle-même  rnmplie  de  dames
    qui  ont fait  retenir leur place  plusieurs heures auparavant.
      On  se disposait à entendre le  brillant  avocat  de  Chambéry,
    M.  Descotes dont  l'âme  profondément  chrétienne  et  convain-
    cue,  dont le faire  chevaleresque,  dont la  parole  mâle  et entrai-
     nante,  communiquent à tous  les  auditeurs un  irrésistible cou-
     rant d'émotion  et de sympathie.
      Monsieur  le  préfet et Monsieur  le  sous-préfet sont  présents.
     Vis  à  vis  est  le  R.  Père  gardien  assisté de  plusieurs ecclé-
    siastiques.  M.  Descotes  et M.  Bordeaux sont à leurs bancs.
      Il  règne  daus  toute  la  salle  en  expectative  une  certaine
    agitation  discrète  qui  trahit  une  espérance  dans  le  fond  des
    cœurs :  celle  d'un  grand  et  beau  débat  couronné  par  un
    légitime succès.
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