Page 634 - Les merveilles de l'industrie T1
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630                  MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.


             380 marais environ qui s’étagent sur les bords   à 3 centimètres de hauteur. Mais pour
             de la rivière Sado, depuis le port de Sétu-   celle-ci on ne laisse pas évaporer jusqu’à
             bal jusqu’à celui d’Alcacer-do-Sal.       siccité, et le sel est recouvert de 2 centimè­
               2° Le groupe de Lisbonne, comprenant    tres d’eau mère. On lève le sel en laissant
             300 marais, qui s’étendent sur les deux   les eaux mères. Si la saison est favorable, on
             rives de la vaste rade que forme le Tage à   tente une troisième récolte, et, en septembre,
             son embouchure, et se succèdent jusqu’à   on inonde le marais.
             Villafranca-de-Xira au nord, et jusqu’à     Les choses se renouvellent ainsi chaque
             Alcochète au midi.                        année, et comme les eaux mères restent
              3“ Le groupe d’Aveiro, dont le centre prin­  toujours sur le marais, on devrait penser
             cipal, comprenant 350 marais, est situé sur   que l’accumulation des sels magnésiens
             les bords du Vouga, et auquel il faut joindre   doit rendre la saunaison impraticable. Il
             les groupes secondaires de Figueira, à    n’en est rien pourtant.
             l’embouchure du Mondego, de Matozinhos,     La première idée qui se présente à l’es­
             près Porto, sur les bords du Douro, et enfin   prit, pour expliquer cette anomalie, c’est
             de Vianna sur les bords du Rio-Lima.      que la première récolte est très-chargée en
               Chacun de ces groupes de salins opère   sels magnésiens. Néanmoins l’analyse mon­
             par un procédé qui lui est propre.        tre qu’il n’en est pas ainsi, et que ce sont
               Les marais salants à Sétubal sont d’une   les sels de la seconde récolte qui sont les
             simplicité surprenante. Ils représentent une   plus chargés de magnésie :
            vaste cuvette de 1 à 2 hectares, divisés en   Voici l’analyse, faite par M. Aimé Girard,
             carrés de 100 à 150 mètres de superficie et   des sels provenant de l’évaporation des eaux
             de 20 centimètres de profondeur, isolés les   de la mer près de Sétubal.
            uns des autres par des chemins de 1 mètre
                                                                                        n
             de large, et communiquant avec un grand ré­                                 - —
             servoir, destiné à emmagasiner l’eau de mer.               {'•récol.. 2e récol.  lre récol. 2e récol.
                                                       Matières insolubles.......  0,015  0,030  0,012  0,047
             Cette eau arrive directement dans les car­  Sulfate de chaux...........  1,087  2,081  1,117  1,298
             rés, s’y évapore, et y dépose le sel, sans autre   Sulfate de magnésie....  0,268  1,881  0,477  1,789
                                                       Chlorure de magnésium.. 0,097  1,824  0,434  2,000
             concentration, et sans purification. En au­  Chlorure de sodium..... 98,533 94,184  97,960 91,866
             tomne, on recouvre le marais en entier                    100,000 109,000  100,000 100,000
             de 50 à 60 centimètres d’eau. Au printemps,
             cette eau s’évapore, et au mois de juin, les   La disparition des sels magnésiens paraît
             chaussées se découvrent. Les carrés sont   résulter d’un phénomène particulier dont
             alors nettoyés, puis abandonnés à eux-mê­  le sol du marais serait la cause détermi­
             mes, et de temps à autre rafraîchis à l’aide   nante. Sur le fond du marais de Sétubal se
             de nouvelles eaux.                        développe un feutre compacte, dû à la végé­
               Sous l’influence des vents du nord-est qui   tation d’une conferve marine, et qui, au
             régnent à cette époque, l’évaporation est   dire des sauniers de Portugal, est indis­
             très-rapide, et, après une vingtaine de jours,   pensable à la production des récoltes. C’est
             on trouve sous chaque carré, une couche de   là, d’après M. Aimé Girard, l’agent de cette
             4 à 5 centimètres presque sèche. C’est la   épuration, qui serait le résultat d’une dia­
             première récolte. On lève ce sel, on fait   lyse, comme disent les chimistes modernes,
             arriver de l’eau dans les réservoirs, et vingt   plus active pour les sels magnésiens que
            jours après, on procède à une deuxième     pour le chlorure de sodium, et se produi­
             récolte, qui donne une couche de sel de 2   sant surtout dans le courant de l’hiver.
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