Page 622 - Les merveilles de l'industrie T1

618 MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.

tements de l’Hérault et des Pyrénées-Orien­ deux ou trois types jouissant de propriétés
tales, recommandent à leurs sauniers d’éva­ spéciales qui font donner à chacun d’eux
cuer les eaux mères dès qu'elles ont atteint la préférence pour certains usages détermi­
28 à 30 degrés de concentration. Il est nés. L’addition des eaux mères est exclue
pourtant douteux que tous les sauniers se de ce mode de fabrication.
conforment à cette règle ; il est probable Le fractionnement des produits de la cris­
que beaucoup d’entre eux, à l’insu des tallisation en plusieurs qualités distinctes,
propriétaires, gardent les eaux mères d’une très-rationnel dans un grand établissement
année, pour les utiliser l’année suivante. dont la production se partage entre des dé­
On ne saurait blâmer cette pratique, car bouchés très-variés, présente, au contraire,
si le sel obtenu est plus amer et plus déli­ beaucoup moins d’intérêt pour un petit sa­
quescent, une exposition un peu longue à lin qui n’a pas la meme variété de débou­
l’air le débarrasse au bout d’un temps as­ chés et qui consacre souvent la totalité de
sez long des sels magnésiens. sa production à satisfaire une commande
Le mélange, ou coupage, des eaux mères unique. On rie doit donc pas regarder
s’opère, soit dans un canal d’où le liquide comme défectueux le mode de fabrication
mélangé s’écoule sur les tables salantes, généralement suivi par les petits produc­
soit sur les tables mêmes, où arrivent en teurs.
même temps les deux espèces d’eaux, soit Certains petits salins sont, d’ailleurs, dis­
enfin dans une pièce,nomm ée nourrice, où les posés de manière à permettre à volonté
eaux fortes se rassemblent et où l’on amène l’un ou l’autre mode de fabrication, selon
l’eau faiblement concentrée, en ayant soin les commandes. Tout dépend des conditions
que cette dernière soit en assez grande commerciales dans lesquelles on se trouve
quantité pour que le liquide provenant du placé. Les grands salins, qui n’ont guère de
mélange ne dépose pas de sel dans la débouchés qu’à la consommation alimen­
pièce nourrice, mais seulement sur les ta­ taire et qui ont même peine à écouler la
bles qui doivent le recevoir. totalité du type n» 1 qu’ils peuvent produire,
doivent évidemment exclure complètement
En résumé, on peut, dans les salins du les eaux mères. Au contraire, les petits
Midi, distinguer deux modes de fabrication salins qui, comme ceux de Bouc, ont, grâce
bien distincts. Le premier, usité surtout à leur situation géographique, des débou­
dans les petits établissements, donne un chés assurés pour la pêche et l’exportation,
type de sel unique : les tables sont à alimen­ doivent chercher à produire le plus possi­
tation indépendante. Le sel a cristallisé dans ble un sel léger et déliquescent. L’emploi
les eaux de densité croissante et a été obtenu régulier des eaux mères qui, en accroissant
avec une intervention plus ou moins grande la production, donne au sel précisément les
des eaux mères. Il laisse à désirer sous le qualités qu’exigent ses débouchés spéciaux,
rapport de la pureté chimique, mais convient est donc, dans ce genre de salins, parfaite­
d’ailleurs parfaitement à certains usages, ment rationnel.
pour lesquels il est préféré à tout autre
type. Arrivons à la récolte du sel.
Le second mode de fabrication, c’est-à-dire La récolte se fait vers les mois de juillet
le fractionnement, adopté surtout dans les et d’août, et de la même manière, dans les
grands établissements, est caractérisé par la trois départements de l’Hérault, de l’Aude
division des produits de la cristallisation en I et des Pyrénées-Orientales.