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620 MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.
40 sont employés au javelage et au portage mente d’eau saturée, et le dépôt du sel re
jusqu’aux bateaux, 5 sur les bateaux, 5 à la commence. On fait même quelquefois, a
grue. Chaque grue met en camelles environ Bouc, plus de deux levages par an. Si l’ache
500 tonnes par jour, ce qui fait environ teur demande des sels très-légers, on fait
10 tonnes par homme. Avec 100 hommes, jusqu’à cinq ou six récoltes. On lève alors
on peut, en un mois, lever tout le sel récolté des couches d’un demi-centimètre à un cen
à Giraud. Sans les grues, il faudrait au moins timètre tous les huit, dix, douze jours. Les
300 hommes, nombre qu’il serait impossible sels ainsi récoltés sont, d’ailleurs, tout aussi
de se procurer en Camargue. blancs et aussi propres, grâce au soin ex
La levée du sel (fig. 379) est un travail ex trême avec lequel les tables sont entretenues
cessivement pénible. Les ouvriers passent la et nettoyées.
journée sous un soleil brûlant, et souvent Pour conserver le sel, on en fait de
ils prolongent le travail fort avant dans la grands tas à base rectangulaire, terminés
nuit. Ils arrivent à gagner ainsi 7, 8 et par une arête horizontale, qui portent,
même 10 francs par jour ; mais après quel comme nous l’avons dit, le nom de camelles.
ques semaines de ce travail, leurs forces Ils sont tantôt couverts et tantôt découverts.
sont complètement épuisées, et ils seraient Dans le département du Gard, les couver
hors d’état de commencer une nouvelle tures se font avec des joncs. Dans les dépar
campagne. tements des Bouches-du-Rhône et du Var,
La date et la durée de la récolte varient elles sont composées de longues tuiles demi-
suivant les circonstances locales et surtout cylindriques.
suivant la facilité plus ou moins grande avec Très-souvent les camelles sont laissées
laquelle on se procure, à un moment donné, entièrement à découvert. Le sel est alors lavé
le nombre d’ouvriers nécessaire. Dans tous par les pluies et subit un déchet plus con
les salins de la Compagnie du Midi, on com sidérable ; mais ce lavage à la pluie purifie
mence le levage du 25 au 30 juillet. Le ja le produit, en entraînant les sels de magnésie.
velage doit être, autant que possible, ter Le sel devient ainsi moins amer et moins
miné vers le 15 août, à cause des pluies déliquescent. Ordinairement, avant de cou
d’orage qui sont fréquentes dans la deuxième vrir les camelles, on les laisse arroser par
quinzaine d’août. Le portage se prolonge les premières pluies d’automne.
jusque vers le 1" septembre, ce qui élève Cette exposition momentanée et perma
à un mois la durée moyenne de la récolte. nente à l’air est donc une véritable purifica
Cette durée se réduit à une quinzaine tion. C’est l’équivalent du lavage mécanique
de jours pour les petits salins. A Hyères, dans l’eau de mer saturée de sel, que l’on
où l’on manque de bras, la récolte ne se pratique pour raffiner les sels de l'Ouest.
termine guère avant la fin de septembre,
et dure ainsi près de deux mois.
Dans les petits salins de Bouc, où l’on
fabrique un sel assez léger et déliquescent,
on fait, d’ordinaire, deux levages par an : le CHAPITRE XIII
premier vers le 15 juillet, le second vers le EXPLOITATION DES EAUX MÈRES DES MARAIS SALANTS DO
15 septembre. Le premier levage n’inter MIDI DE LA FRANCE, POUR EN RETIRER LA POTASSE.
rompt la production d’une table que pendant
deux ou trois jours. Dès qu’elle est débarras Dans les marais salants de l’Ouest, les
sée de son sel, on la nettoie, puis on l’ali ( eaux mères, c’est-à-dire le résidu de l’éva-