Page 628 - Les merveilles de l'industrie T1
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624                  MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.


               conférences, on s’occupa, non-seulement de   par cet obstacle. L’invention des machines
               fixer d’une manière précise, d’après les ré­  réfrigérantes de M. Carré vint bientôt lui
               sultats obtenus tant au Bagnas qu’à Rassuen   suggérer une heureuse solution du pro­
               et à Berre, les règles à suivre dans l’exploi­  blème. Ce n’est pas seulement avec une
               tation des eaux mères, mais encore de dé­  dissolution de sel mixte (sel marin et sulfate
               terminer approximativement les dépenses   de magnésie) qu’on peut, par refroidisse­
               de première installation nécessitées par l’ex­  ment, obtenir du sulfate de soude ; les eaux
               ploitation nouvelle et la valeur des produits   mères à 32°,5 et même l’eau vierge à 25 de­
               qu’elle devait fournir.                   grés, peuvent en fournir, pourvu qu’on
                 Dès 1851, le traitement des eaux mères fut   abaisse suffisamment leur température. Seu­
               organisé au salin de Berre par la méthode   lement la proportion de sulfate de soude
               des eaux à 35 degrés. Mais les résultats   obtenue est d’autant moindre et l’opération
               ne répondirent pas à toutes les espérances   exige une température d’autant plus basse,
               qu’on avait conçues. Le sol de Berre, beau­  que la dissolution est moins riche en sul­
               coup plus perméable que celui du Bagnas,   fate de magnésie. Les appareils Carré four­
               laissait perdre une portion considérable des   nissent les moyens d’extraire immédia­
               eaux mères ; la perte allait croissant à me­  tement du sulfate de soude des eaux qui
               sure que la concentration augmentait et que   viennent de déposer du chlorure de so­
               les eaux devenaient ainsi plus précieuses.  dium. M. Merle jugea bon de ne soumettre
                 Cependant, comme d’une part, on trouva   à l’action du froid que des eaux moyen­
               des débouchés avantageux pour le sulfate   nement concentrées. Il fixa à 28 degrés la
               de magnésie, et que, d’autre part, le prix   limite de la cristallisation du chlorure de
               toujours croissant du chlorure de potassium,   sodium. La méthode nouvelle prit, par suite,
               qui s’éleva bientôt à 55 et 60 francs, com­  le nom de méthode des eaux à 28 degrés, et
               pensait en partie la perte éprouvée sur le   voici comment on la met en pratique.
               rendement prévu , les résultats obtenus à   Méthode des eaux à 28 degrés. — Les eaux
               Berre furent, en définitive, excellents, et ne   mères des marais, salants parvenues à
               firent que confirmer les espérances qu’on   28 degrés de l’aréomètre de Baumé, sont em­
               fondait sur les eaux mères. La compagnie   magasinées dans de vastes et profonds ré­
               des salins du Midi (société Renouard) ré­  servoirs, où on les accumule pendant toute
               solut d’exploiter les eaux mères dans son   la campagne salinière. Elles sont ensuite
               immense salin de Peccais, et M. Henry     reprises dans ces réservoirs, toute l’année,
               Merle, secondé par un ingénieur distingué,   au fur et à mesure des besoins.
               M. Levât, disposa le vaste salin de Giraud   Ces eaux sont d’abord soumises, dans les
               (dont la superficie est environ de 1,000 hec­  appareils Carré, à un froid de — 18°. Elles
               tares) pour l’exploitation des eaux mères par   abandonnent ainsi une forte proportion de
               la méthode des eaux à 35°.                sulfate de soude. Des appareils Carré elles
                 Malheureusement le sol de la Camargue,   passent dans des chaudières, où on les con­
               se trouva être beaucoup moins imperméable   centre au moyen du combustible. Dans ces
               qu’on ne l’avait pensé. A Giraud, plus en­  chaudières on obtient du sel marin raffiné,
               core qu’à Berre, on constata que, dans l’ex­  auquel son extrême légèreté assure des dé­
               ploitation des eaux mères, la difficulté capi­  bouchés avantageux. Après avoir été ame­
               tale est de se procurer la matière première   nées dans les chaudières à 36 degrés de con­
               des opérations.                           centration, les eaux sont conduites dans des
                 M. Henry Merle ne se laissa pas arrêter   cristallisoirs. Le chlorure double de potas-
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