Page 524 - Les merveilles de l'industrie T1
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520                    MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.


                     France il fait rarement des froids prolon­  Prusse et les conséquences de ce fait pour
                     gés, cette industrie avait quelque chose   l’industrie française de la fabrication de la
                     de trop éventuel. M. Balard remplaça avec   potasse avec les eaux mères des marais
                     avantage le froid de la nature par celui de   salants.
                     l’art. Il fit usage des machines Carré, qui   Une source de sel marin, jaillissant au
                     produisent à peu de frais un grand abais­  milieu de la petite ville de Stassfürt, en
                     sement de température. Le sulfate de soude   Prusse, avait appelé en 1838 l’attention des
                     put ainsi se fabriquer à coup sûr et en tout   savants et des industriels. En 1839, des son­
                     temps.                                    dages furent commencés, et l’on trouva la
                       Ce sulfate de soude était versé dans le   couche de sel gemme à 300 mètres de pro­
                     commerce, où il trouvait des débouchés dif­  fondeur. Laissons maintenant parler M. Ba­
                     férents, mais dont le principal était la fa­  lard.
                     brication du carbonate de soude par le
                                                                 « La mine de sel gemme de Stassfürt est la plus
                     procédé Leblanc. •
                                                               grande masse connue de sel qui ait été accumulée
                       Les eaux mères des marais salants, étant   dans le sol par suite de l'évaporation continuelle des
                     ainsi débarrassées des sels de soude, ne ren­  eaux salées pendant les périodes géologiques. Cette
                                                               masse inépuisable de sel gemme permet d’exploiter
                     fermaient plus guère que des chlorures de
                                                               depuis sept à huit ans, deux puits creusés à Stassfürt,
                     potassium etde magnésium. On faisait évapo­  et un troisième, creusé en 1858, à Anlvalt, dont le
                     rer ces liqueurs, qui, parle refroidissement,   terrain n’est séparé de celui de Stassfürt, qu’il en­
                                                               clave, que par une rivière, la Bade, qui coule en­
                     laissaient déposer des cristaux de chlorure
                                                               tre les deux.
                     de potassium et de magnésium. Par la cris­  « A une profondeur de 280 mètres environ, on
                     tallisation , on séparait le sel de magnésie   trouva, en creusant les puits de, Stassfürt, un mé­
                     et l’on obtenait le chlorure de potassium   lange de sels de potasse, de soude et de magnésie.
                                                               Leur présence, sur une épaisseur d’environ 70 mè­
                     pur, sel que l’on transformait en potasse par
                                                               tres, ne faisait augurer rien de bon du gisement
                     les mêmes moyens et avec les mêmes fours   salin qu’on cherchait, et plus d’une fois, en voyant
                     et appareils qui servent à obtenir la soude   diminuer la proportion de sel marin contenue dans
                                                               l’eau du trou de soude, on fut sur le point de renon­
                     factice.
                                                               cer au fonçage du puits. L’espérance, justifiée plus
                       Voilà comment les usines créées à l’insti­  tard par l’événement, que cette couche de sels im­
                     gation de M. Balard, dans les salines du   purs n’occupait que la partie supérieure du gisement,
                     midi de la France, pouvaient verser dans le   détermina cependant à continuer ce fonçage. Ainsi,
                                                               par une résistance du même genre que celle que les
                     commerce du chlorure de potassium en      sauniersont,pendant silongtemps,apportée à l’exploi­
                     quantités considérables. Malheureusement   tation des eaux mères des salines, la préoccupation
                     la découverte d’un énorme gisement natu­  de la recherche exclusive du sel marin pur faisait
                                                               regarder comme inutiles ou même comme nuisibles
                     rel de sel de potasse, à Stassfürt, en Prusse,
                                                               les produits qui le recouvraient, et qui font pour­
                     vint renverser les données économiques de   tant la principale richesse du gisement.
                     cette fabrication. M. Balard dut alors se li­  « Ce fut M. H. Rose qui signala, en 1859, cette
                                                               richesse. L’exploitation du sel gemme, commencée
                     vrer à de nouvelles recherches, et il imagina
                                                               en 1857, avait déjà fourni des quantités considérables
                     une seconde méthode, qui s’ajoute à la pre­  de sel marin, avant que l’on eût pensé à utiliser les
                     mière et la complète très-heureusement.   composés potassiques ; mais un échantillon de l’un
                       Dans le rapport sur les produits chimiques   de ces sels ayant été soumis à M. IL Rose en 1859,
                                                               reconnut bien vite que ce produit naturel n’était au­
                     de l’Exposition internationale de 1867 (1),   tre que ce chlorure double de potassium et de ma­
                     M. Balard raconte en ces termes la décou­  gnésium hydraté qui, depuis quelques années, était,
                     verte du gisement naturel de potasse en   dans quelques salines du midi de la France, la forme
                                                               sous laquelle on concentrait la potasse contenue
                      (1) Tome VU des Rapports du jury international. In-8”.   dans l’eau de la mer. Il signala à l’attention du gou­
                     Paris, 1868, pages 78-79.                 vernement et des industriels toute l’importance de
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