Page 416 - Les merveilles de l'industrie T1
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L’INDUSTRIE DES SAVONS.                              411

             11 en est de même pour la soude. Un grand   international de l’Exposition de Londres
             nombre de fabriques de soude factice exis­  de 1855.
             tent à Marseille ou dans les environs. Les
             fabricants de savon peuvent donc se pro­    « D’après F. Baudouin, savonnier qui exerçait à
                                                       Marseille, on peut évaluer la production marseil­
            curer, dans d’excellentes conditions, cette
                                                       laise, en 1775, en tenant compte de la différence des
             matière qui entre pour une si large part dans   prix des matières premières, comparés aux nôtres,
             les opérations des savonneries.           et de l’absence des droits, à 25 millions de francs.
                                                       On évaluait alors la production totale du savon en
                                                       France à 40 millions, et l’exportation pour l’étranger
                                                       à 8 millions.
                                                         « En 1789, quoique Marseille fût en possession de
                                                       fournir presque tout le savon qui se consommait en
                         CHAPITRE III                  France, les produits de cette fabrication, a Marseille
                                                       et dans le Midi, n’étaient plus évalués qu’à 30 mil­
                                                       lions.
            coup d’œil sur l’état actuel de l’industrie dü savon
                                                         « D’après un mémoire déposé aux archives du Mi­
                      EN FRANCE ET A L’ÉTRANGER.
                                                       nistère des affaires étrangères, la production de Mar­
                                                       seille était alors de 725,000 quintaux table (295,000
               Quelques chiffres que nous allons rappor­  quintaux métriques), et le prix moyen de 33 francs
             ter donneront une idée exacte de l’état pré­  le quintal table (79 francs les 100 kilog.), ce qui re­
                                                       présentait une valeur de 23 millions de francs.
             sent de l’industrie du savon chez les nations
                                                         « 11 ne faut pas oublier la différence du prix des
             manufacturières.                          matières premières, celles-ci ne payant alors qu’un
               Nous rappellerons d’abord un passage,   droit très-léger.
                                                         « L’exportation était de 3,160,379 kilog. dont :
             qui a été souvent cité, des Lettres sur la
             Chimie de M. Liebig :                       Pour l’Europe, le Levant e les
                                                           États-Unis..............................  1,412,110  kilogr.
              « La quantité de savon que consomme une nation,   Pour l’Amérique et les Antilles
             dit M. Liebig, pourrait presque servir de mesure   françaises...............................  1,576,647  —
             pour apprécier le degré de richesse et de civilisation   Pour l’Afrique................................ 7,700  —
                                                         Pour les Indes, l’Ile-de-France
             auquel elle est parvenue. Entre deux nations égale­
             ment peuplées, la plus riche et la plus civilisée sera   et Bourbon.................................  163,922  —
             celle qui consommera le plus de savon. Il ne s’agit
                                                         « En 1811, à l’époque qui suivit le décret de pro­
             pas ici de fantaisie, mais de propreté, et ce senti­  hibition, la fabrication n’avait pas dépassé les chiffres
             ment se rattache à celui de la civilisation elle-même.
             Au Moyen âge les seigneurs qui conciliaient l’ab­  de 1789, elle ne put prendre un essor plus grand
                                                       qu’à l’aide de nouveaux aliments, que la soude arti­
             sence de toute propreté dans leurs personnes et   ficielle lui permit de joindre à la base d’huile d’o­
             leurs vêtements avec la profusion de riches parfums   live.
             et d’odorantes essences, étaient plus luxueux que   «En 1814, le nombre des savonneries marseillai­
             nous ne le sommes pour le manger et pour le boire,   ses était de 71, composées de 330 chaudières, et l’on
             pour les ajustements et pour les chevaux; mais
                                                       comptait autant de fabricants que de fabriques.
             combien est grande la différence entre leur époque   « En 1820, le nombre de ces dernières était de 88,
             et la nôtre, si nous regardons l’absence de la pro­  elles contenaient 420 chaudières grandes ou petites.
             preté comme un signe de dégradation et de misère ! »
                                                         « Cependant le nombre d’ouvriers n’avait point
                                                       augmenté, soit parce que toutes ces fabriques n’é­
               Nous avons vu qu’en 1660, on comptait à   taient pas à la fois en activité, soit parce que l’étal
             Marseille 7 fabriques de savon. On manque   de perfection auquel cette fabrication était parvenue,
                                                       surtout depuis la découverte de Leblanc, en avait
             de détails sur les cent quinze années qui sui­
                                                       simplifié les procédés et diminué les frais ainsi que
             virent, mais nous avons des renseignements   la main-d’œuvre, tout en doublant les produits.
             exacts sur la savonnerie marseillaise, qui   « Ün rapport fait à la chambre de commerce
             remontent à 1775.                         en 1829, établit la statistique de cette industrie à
                                                       Marseille, comme il suit :
               M. Wolowski s’exprime ainsi, dans son
                                                         « 43 fabriques en activité, exploitées par 32 fabri­
             rapport à la commission française du jury   cants, contiennent 208 chaudièresde 100 à 110 quin-
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