Page 412 - Les merveilles de l'industrie T1
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L’INDUSTRIE DES SAVONS. 407
live, mais aussi sur les produits loyaux, c’est- Nous n’en dirons pas autant de l’introduc
à-dire sur le savon composé d’un mélange tion dans la fabrication du savon des huiles de
d’huile d’olive et d’huile de graines. Mais palme, decolza, de coton, de lin, de coco, etc.,
le nombre des fabricants de Marseille qui dont l’emploi, très-souvent abusif, a donné
tiennent à honneur de conserver cette mar lieu à des fraudes que l’on dissimule avec
que va toujours en diminuant. plus ou moins d’habileté, mais qui sont une
Fidèle à son système de prohibition, Na perte pour le consommateur et nuisent à
poléon Ier avait interdit, en 1810, l’entrée l’industrie elle-même. Voici ce que dit à ce
en France, non-seulement des savons étran sujetM. Wolowski, le rapporteur de l’Exposi-
gers, mais encore des soudes qui étaient tion internationale de 1867, que nous avons
nécessaires à la fabrication du savon. déjà eu l’occasion de citer :
Cette prohibition pouvait être un coup
mortel pour l’industrie marseillaise. Au «On n’admettra pas comme amélioration l’emploi
fond, elle était inutile, car les guerres de la de l’huile de coco pour les savons dits à froid, la
quelle, au lieu de ne supporter comme les huiles,
Révolution et celles qui suivirent avaient in
les'suifs et les graisses, que 28 à 35 p. 100 d’eau,
terrompu les relations commerciales avec les peut en supporter jusqu’à soixante-dix pour cent, et
pays qui fournissaient des savons étrangers, permet ainsi d’y ajouter tous les mélanges ( talc,
sulfate de baryte, fécule, etc.), pour tromper indi
ainsi que des soudes naturelles. gnement le consommateur. »
Marseille aurait pourtant vu péricliter ses
usines par l’insuffisance des soudes, si une M. Foucart, auteur d’un rapport sur les
grande révolution industrielle ne se fût ac savons et l'industrie savonnière, à l’Exposi-
complie à cette époque. Nous voulons par tion internationale de 1867, s’exprime
ler de la substitution de la soude artificielle ainsi :
à la soude naturelle, d’après le procédé Le
« Les corps ne sauraient produire aujourd’hui, ni
blanc. Nous donnerons tous les détails né
plus ni autrement que par le passé, et nul ne pré
cessaires sur la grande découverte de la tendra que les additions, dont on surchage si fré
soude factice dans la Notice qui suivra celle- quemment les savons, soient un perfectionnement.
ci, et qui sera consacrée à ^industrie des Chercher à retenir de l’eau salée dans la pâte, à y
introduire du talc, du sulfate de baryte, des terres
soudes et des potasses. Bornons-nous, pour argileuses ou ocreuses, des fécules de toutes sortes
le moment, à dire que Marseille recueillit pour augmenter le poids, ou pour obtenir un bon
promptement les fruits de cette découverte marché fallacieux, c’est de la tromperie et non de
l’industrie, et l’on a déjà bien des fois manifesté le
fondamentale, et que bientôt la fabrication
regret que de semblables opérations restassent im
du savon eut pour accessoire obligé la fa punies. »
brication de la soude artificielle.
L’emploi de la soude artificielle permit, Depuis le commencement de notre siècle
ou pour parler plus exactement, nécessita jusqu’en 1830, Marseille posséda, on peut le
l’introduction dans les savonneries des hui dire, le monopole de la fabrication des sa
les de graines, telles que l’huile d’œillette, vons. La situation de son port, qui la mettait
pour éviter la production de savons trop en communication avec les pays de l’Orient
durs. L’emploi de cette huile, et plus tard producteurs d’huile, le voisinage de l’Italie,
de celle de graines d’arachide et de sésame, et d’un autre côté notre propre territoire,
permit d’abaisser le prix du savon, tout en qui lui fournissait abondamment les huiles,
conservant une fabrication loyale, et en fa enfin la soude factice qui se fabriquait sur
vorisant sur une vaste échelle les intérêts ses plages en quantités immenses, lui don
agricoles. naient en partage tous les éléments de cette