Page 546 - Merveilles Industrie Tome 4
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540 MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.
divine d’Arnanld de Villeneuve fut em Les confiseurs italiens qui avaient les pre
ployée à ce titre. Plus tard, on rendit ce miers fabriqué ces nouvelles boissons, les
médicament plus agréable, par l’addition avaient désignées sous le nom de liquori,
de jus de citron, d'eau de roses ou d’eau de nom qui leur est resté. Ils s’appliquèrent,
Heurs d’oranger. En 1760 Veau divine était plus que toute autre nation, à rendre les li
préparée, dans le couvent des religieuses queurs agréables au goût et à les fabriquer
•du Saint-Sacrement, rue Saint-Louis, au à assez bas prix pour en répandre l’usage
Marais. C’était là que tout Paris allait dans toutes les classes de la société. Ce fu
■chercher cette liqueur spiritueuse, univer rent donc des Italiens, qui, les premiers, fa
sellement renommée pour l’extrême déli briquèrent et vendirent à Paris des liqueurs
catesse de son arôme et de sa saveur. fines, comme ils avaient les premiers fabri
Paracelse, le célèbre médecin du sei qué des glaces à Paris.
zième siècle, qui introduisit avec tant de La première liqueur de table vendue par
bonheur dans la médecine les produits de les confiseurs italiens, fut le rossolo. On ne
la chimie de son temps, contribua beau peut dire exactement quelle est l’étymologie
coup à répandre l’usage des liqueurs alcoo du mot rossolo, liqueur très-estimée et qui
liques médicamenteuses. Paracelse a atta devint très-populaire en France, sous les
ché son nom à diverses compositions de ce rois Henri III et Henri IV.
genre : telles sont le grand arcane, le grand Sous Louis XIV, le nombre des liqueurs
■circulé, le petit circulé, mais surtout l’e- fabriquées en France augmenta considéra
lixir de propriété, qui avait en médécine blement. Les ratafias de cerise et d’œillet
toutes sortes de vertus miraculeuses. étaient surtout en vogue.
Un autre médecin chimiste, Brouaut, Les premières liqueurs servirent à ré
poussa plus loin l’art de préparer les liqueurs chauffer la vieillesse de Louis XIV.
•médicamenteuses, en adjoignant à l’alcool Dans notre siècle, qui a vu la triste et
les huiles essentielles tirées des drogues les prodigieuse diffusion de l’usage .des bois
plus actives. Dans son Anatomie du vin et sons alcooliques dans toutes les classes de
de T eau-de-vie, Brouaut donne les formules la société et dans toutes les parties du
de ces nouvelles liqueurs, qui contenaient, monde, la fabrication des liqueurs de table
en même temps que le sucre et l’alcool, ne pouvait manquer de prendre une exten
les teintures de safran, de macis, de sauge, sion immense. Pour ne parler que de la
ou celles de romarin, de menthe, etc., etc. France, Paris, Lyon, Montpellier, Cette,
C’est au seizième siècle que l’eau-de-vie, Bordeaux , Limoges , Orléans , Rouen,
•qui n’avait été employée jusque-là que pour Amiens, etc., rivalisent pour le prix et les
composer les liqueurs médicamenteuses, qualités des liqueurs de table.
prit place sur les tables, et devint peu à 11 faudrait un volume pour décrire la
peu la boisson favorite du seigneur et du préparation des différentes liqueurs de table
bourgeois. En 1532, à l’époque du mariage qui existent dans le commerce français.
de Henri II, alors duc d’Orléans, avec Ca Nous nous contenterons de les mentionner
therine de Médicis, on vit pour la pre par leurs noms les plus vulgaires.
mière fois les liqueurs alcooliques paraître Le rhum, ou tafia, est, comme nous
à la fin des repas. C’était un confiseur flo l’avons déjà dit, le produit de la distilla
rentin, amené par Catherine de Médicis, tion des mélasses qui forment le résidu
qui avait fait connaître cette boisson à la de la fabrication du sucre de canne aux
cour de Henri IL colonies.