Page 419 - Merveilles Industrie Tome 4
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LA BIÈRE.                                   413


         tarde pas à fermenter, sans avoir reçu, d’ail­  que l’on remplace quelquefois par des bour­
         leurs, aucune levûre.                      geons de sapin ou des baies de genièvre.
            On peut boire le kwas après huit jours de   Le liquide étant refroidi, on le reçoit dans
          fermentation.                             des tonneaux, préalablement soufrés; on
            La quantité d’eau employée doit être telle  1 abandonne à lui-même, sans aucune ad­
         qu’avec les proportions de seigle et d'orge  dition de levûre, et en le maintenant dans
         que nous avons citées (1 poud de seigle,   un endroit frais. Il subit alors une sorte
         | poud d’orge) on obtienne 10 védras  de fermentation basse, qui dure environ deux
          (123 kilogrammes) de kwas.                mois. Au bout de ce temps seulement, le
            Supposez que l’on ajoute du houblon  kwas est bon à consommer.
          au moût de kwas, c’est-à-dire au liquide    D’autres fabricants ajoutent de la levure
          obtenu par l’infusion de graines de seigle  au moût refroidi, et alors la fermentation
          et d’orge, et qu’on fasse cuire le moût avec  ne dure que huit à dix jours. Le produit peut
          ce houblon, on aura l’analogue des bières  être bu immédiatement.
          belges, dont nous venons de donner la des­  On voit que le kwas ainsi préparé a dégé­
          cription, et qui sont, comme on l’a vu, des  néré de son antique origine. L’addition du
          bières fromentacées, fermentant sans levûre.  houblon et de la levûre le font rentrer dans
            Privé du houblon, qui communique à la  la catégorie des bières. 11 est donc vrai que
          bière la vertu de résister à la fermentation  le vieux kwas des Russes ne sera bientôt
          acide, le kwas est une boisson très-altérable.   plus qu’un souvenir.
          Il faut le consommer peu de jours après sa
          préparation complète.                       Nous venons de voir que l’orge et le fro­
            Le kwas ne se prépare pas seulement chez   ment ne sont pas les seules graines consa­
          les particuliers. De grandes fabriques le li­  crées à la fabrication des bières. Le sarrasin
          vrent au public. Ces fabriques opèrent,   entre dans la préparation de quelques bières
          d’ailleurs, de la même manière que les  belges. L’avoine, le seigle entrent, comin;
          particuliers. Seulement, au lieu du tonneau  il vient d’être dit, dans la boisson national;
          garni d’un lit de paille à son fond, elles  des Russes; le maïs, le millet, le riz ser­
          emploient la cuve-matière de nos brasseurs.  vent, chez beaucoup d'autres peuples, à pré­
            Il faut ajouter, cependant, que depuis  parer des vins de graines. On peut dire, en
          l’introduction en Russie des brasseries ba­  général, que chez tous les peuples qui ne
          varoises, les fabricants de kwas ont proton- I  cultivent pas la vigne, les graines des céréales
          dément modifié leurs procédés. Ils opèrent  produites par leur agriculture sont consa­
          aujourd’hui de la manière suivante :      crées à la fabrication des boissons fermentées.
            lis prennent parties égales d’orge, de fro­  M. Girardin, dans ses Leçons de chimie élé­
          ment et d’avoine, etquelquefoispartieségales  mentaire (1), a dresse le tableau complet des
          de seigle et d’avoine seulement, germés et  boissons fermentées en usage chez les dif­
          séchés, c’est-à-dire à l’état de malt. Ils pra­  férentes nations du globe. Cette liste con­
          tiquent l’empàtage et l’infusion dans une  tient des vins de fruits et des vins de graines.
          cuve-matière, en opérant par décoction et  Nous extrayons de cette liste ce qui con­
          brassant vivement à chaque addition d’eau.   cerne les vins de graines.
           Le moût que l’on obtient, après plusieurs   Après le kwas des Russes, qui s’obtient
          décoctions, est reçu dans une chaudière à  avec le seigle et l’orge, M. Girardin cite Jes
           cuire, semblable à celle des brasseries, et  graines de millet, qui, sous le nom Ae pom-
           l’on fait bouillir le moût avec le houblon,   (l)Tome 111, pages 461-462, in-8’. 5' édition. Paris. 1873.
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