Page 201 - Merveilles Industrie Tome 4
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LE LAIT ET SES PRODUITS.                              195


       brique surtout en France. C’est l’espèce la   fromage gras ou demi-gras qu’il s’agit d’ob­
       plus abondante sur nos marchés.           tenir.
         Quant au fromage maigre, il n’existe pas   La chaudière dans laquelle on verse le
       dans le commerce, étant réservé aux habi­  lait, est en fonte. C’est une sorte de ballon
       tants pauvres et aux ouvriers du pays.    renflé, d’un mètre de diamètre, et dont l’ou­
         En Suisse’, on fabrique le fromage gras  verture a près de 55 centimètres. Elle est
       dans les chalets situés vers le sommet des  suspendue par deux anses et un étrier à tige
       montagnes, et les demi-gras dans les plaines,   de fer, à une potence, ou grue de bois, dont
       parce que, dans les parties basses, on peut  l’arbre vertical tourne sur un pivot, ce qui
       vendre avantageusement le beurre, et par  permet d’amener la chaudière dans un four­
       conséquent, écrémer le lait, pour fabriquer  neau, large de 50 centimètres, ayant deux
       des fromages demi-gras. Aussi le commerce  portes de fonte munies de charnières, de
       distingue-t-il, dans les fromages suisses, ceux  sorte qu’on n’a qu’à ouvrir cette devanture
       qui viennent de la montagne et ceux qui ont  chaque fois que l’on veut placer la chaudière
       été fabriqués dans la plaine. L’onctuosité  sur le feu, ou l’en retirer. L’action de la
       de la pâte des premiers l’emporte beaucoup  chaleur employée à propos et convenable­
       sur celle des seconds, en raison de son   ment ménagée, est, en effet, le grand secret
       excès de crème.                           de la fabrication du fromage de Gruyère.
         Que le fromage soit gras ou demi-gras, le   Dès que le lait est versé, on fait tourner
       procédé de sa préparation est le même, à  la potence, pour amener la chaudière sur le
       cette différence près que l’on écréme, que   feu et élever la température du liquide
       l'on n’écrème pas ou que l’on écréme peu le  à 30° environ. Alors on éloigne la chau­
       lait. On peut donc décrire, en même temps,   dière du feu et l’on y verse la présure.
       l une et l’autre fabrication.               C’est dans une poche telle que la repré­
         Ce procédé de fabrication ne varie pas  sente la figure 142, que l’on verse la quantité
       non plus sensiblement, qu’il s’exécute dans
       les chalets de la Suisse, du Jura et de l’Ain,
       etc., ou dans les fruiteries des mêmes pays.
       Nous ne ferons donc pas de distinction entre
       ces deux procédés, c’est-à-dire entre la fa­
       brication dans le chalet rustique ou dans
       l’usine qui se livre, dans de vastes appa­
       reils, à la production de grandes quantités   Fig. 141. — Poche des fromageries suisses.
       de fromages.
         On appelle fruitier, en Suisse comme en   de présure nécessaire pour cailler le lait.
       France, celui qui préside à la confection des   On la répartit bien uniformément dans le
       lroniages, soit dans les chalets, soit dans les  liquide, en l’agitant avec la même poche qui
       fromageries.                              a servi à mesurer et à verser la présure. On
         Le fruitier reçoit le lait des diverses  laisse ensuite le lait en repos loin du foyer.
       provenances ; il déguste chaque jatte, et  Au bout de quinze à vingt minutes, ilest pris.
       rejette le lait qui commence à s’aigrir. Il   La coagulation étant complète, le fruitier
       fait placer dans une chaudière le lait de la  j prend la poche, qui est munie d’un bord tran-
       traite du matin, et il y ajoute le lait de la  • chant, et s’en sert pour couper le caillé dans
       traite du soir précédent, écrémé totalement  i tous les sens.
       011 en partie, ou non écrémé, selon l’espèce de   Dans certains établissements, on se sert,
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