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INDUSTRIE DE L’EAU.                                 8 a

        température est plus basse que — 10’, et ce   mentateur retirait un glaçon de cette four­
        corps ne s’échauffe point. Toute la chaleur   naise en miniature. Et les assistants d’ap­
       qu’il reçoit du vase de platine incandescent,   plaudir à cette merveille de la science !
       le traverse et semble se réfléchir sur sa sur­  Il est un fait encore plus étonnant. Le
        face, sans l’influencer en rien.         protoxyde d’azote est un gaz qui, par la
         Boutigny exécutait cette expérience de   pression et l’abaissement de la température,
        la manière la plus saisissante. 11 faisait   peut être amené à l’état liquide. Ce n’est
        fondre de l’argent ou de l’or dans une cap­  qu’à la température extraordinairement
        sule de platine, puis à la surface de l’ar­  basse de— 88° que le protoxyde d’azote prend
        gent ou de l’or fondus et rouges de feu, il  l’état liquide; en d’autres termes, il entre
                                                 en ébullition, ou ne se réduit en vapeurs
                                                 qu’à — 88°. Si l’on verse du protoxyde d’a­
                                                 zote liquide dans une capsule de platine
                                                 chauffée au rouge blanc, il prend l’état
                                                 sphéroïdal, et conserve, au milieu du pla­
                                                 tine rouge-blanc, une température infé­
                                                 rieure à— 88°. Si alors on ajoute à ce liquide
                                                 un peu de mercure, ce métal, qui ne se so­
                                                 lidifie qu’à — 39°, prend, à ce contact, l’état
                                                 solide. De sorte que l’on retire une barre de
                                                 mercure solidifié d’un creuset rougi au feu !
                                                   Ces phénomènes ne semblent que de pu­
                                                 res curiosités scientifiques, et pourtant ils
                                                 ont leur place dans les préoccupations de
                                                 l’industrie. L’état sphéroïdal que prend
                                                 l’eau peut expliquer le phénomène de l’ex­
                                                 plosion des chaudières à vapeur, resté jus­
                                                 qu’ici à peu près inexplicable si l’on con­
                                                 sidère la violence prodigieuse des effets de
                                                 destruction, effets qui ne semblent pas en
         Fig. 52. — Expérience sur l’état sphéroïdal de l’eau.  rapport avec la cause qui les produit. Des
                                                 maisons entières renversées, des ravages s’é­
        versait de l’acide sulfureux liquide, qui,   tendant à des distances extraordinaires, ne
       prenant l’état sphéroïdal, ne se vaporisait   s’expliquent pas suffisamment par la rup­
       point, et conservait sa température de —   ture de la tôle d’une chaudière à vapeur.
       10°, en tournoyant au-dessus du métal     Boutigny prétendait que l’état sphéroï­
       rougi à blanc. Alors Boutigny faisait tom­  dal de l’eau était la vraie cause de cet
       ber délicatement sur ce globule d’acide   effrayant phénomène. On vient de voir
       sulfureux sphéroïdal, ou caléfié, quelques   que lorsqu’un métal est rougi au feu,
       gouttes d’eau. Le contact de l’acide sulfu­  l’eau qu’on y verse prend l’état sphéroï­
       reux refroidi à — 10° déterminait la con­  dal, c’est-à-dire qu’elle ne se volatilise
       gélation de l’eau ; de sorte qu’en retirant   pas tant que le métal reste au rouge, parce
       promptement la capsule du feu contenant   qu’alors l'eau ne le touche pas, mais que dès
       l’eau, pour la soustraire au contact des corps   que le métal se refroidit, l’eau arrive à son
       incandescents qui l’avoisinaient, l’expéri­  contact, et que tout aussitôt elle se réduit en
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