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                       le nom d'état sphéroïdal. Exposée, mais en  1 « pénétrer qu’en petite quantité dans le
                       vase clos, à des températures au-dessus du   « liquide (1). »
                       rouge, elle se décompose en ses éléments,    Quoi qu’il en soit de l’explication, le phé­
                       oxygène et hydrogène, en subissant le phé­  nomène de l’e'taZ sphéroïdal de l’eau est cer­
                       nomène que les physiciens de nos jours    tainement des plus curieux, et par lui-même,
                       appellent dissociation.                   et par les conséquences qui en découlent.
                         État sphéroïdal de l'eau. — Lorsqu’on   Une goutte d’eau versée sur une lame de
                       place quelques gouttes d’eau sur une barre   fer ou une capsule de platine renversée,
                       de fer, une lame de platine ou d’autre métal   posée sur un support et rougie par la flamme
                       chauffée, au rouge blanc, elle prend la   d’une lampe à alcool, semble danser à la
                       forme sphérique, roule dans tous les sens,   surface de la plaque, sans la toucher (fig. 32).
                       et semble se promener sur la plaque sans   Elle ne participe pas de l’excessive tempé­
                       la toucher. Elle ne bout et ne s’évapore que   rature de ce corps, puisqu’elle ne se vaporise
                       lorsque la température descend et passe au   point. La goutte d’eau n’entre en ébullition
                       rouge brun.                               et ne disparaît, par la vaporisation, que lors­
                         Ce fait singulier et très-curieux, déjà   que la plaque rouge de feu s’est refroidie,
                       connu de Laurent, Leidenfrost, Person,    et est passée au rouge brun ou à une tem­
                       Klaproth et Baudrimont, fut étudié d’une   pérature inférieure.
                       manière très-approfondie par Boutigny, qui
                                                                   On a réussi à déterminer la température
                       donna à cet état sphéroïdal le nom d'état
                                                                 des liquides qui se trouvent à l’état sphé­
                       sphéroïdal, ou globulaire, des liquides, car il
                                                                 roïdal, et l’on a reconnu que cette tempé­
                       est commun à tous les liquides. On a aussi
                                                                 rature est inférieure à leur point d’ébulli­
                       désigné l’ensemble des phénomènes du
                                                                 tion. La température de l’eau, à cet état
                       même genre sous le nom de caléfaction des
                                                                 physique, est inférieure à son point d’ébul­
                       liquides.
                                                                 lition, puisqu’elle n’est que de 96°,5.
                         La cause certaine qui provoque X'état
                                                                   Le liquide qui présente le phénomène le
                       sphéroïdal n’est pas encore bien connue.
                                                                 plus curieux sous ce rapport, c’est l’acide
                       Boutigny l’expliquait par une répulsion
                                                                 sulfureux liquéfié. L’acide sulfureux est un
                       entre les liquides et la surface du vase
                                                                 gaz, mais on peut, par le froid et la pression,
                       chauffé. Cependant, comme cette force de
                                                                 l’amener à l’état liquide. C’est seulement à
                       répulsion ne rentre pas dans les théories
                                                                 la température de — 10° que l’acide sulfu­
                       de la chaleur admises dans la science, les
                                                                 reux se liquéfie, ce qui revient à dire qu’il
                       physiciens venus après Boutigny ont donné
                                                                 entre en ébullition à—10°. Dès lors, si l’on
                       d’autres explications du phénomène. Ils ont
                                                                 prend un vase de platine, qu’on le porte au;
                       prétendu, que l’état sphéroïdal de l’eau
                                                                 rouge blanc, et qu’on laisse tomber dans ce
                       ne met nullement en défaut les théo­
                                                                 vase rougi quelques gouttes d’acide sulfu­
                       ries actuelles de la chaleur. « Ces phéno-
                                                                 reux liquide, elles prennent l’état sphéroïdal,,
                       « mènes, dit un auteur moderne , dépen-
                                                                 et se maintiennent, non en ébullition, mais
                       « dent du rapport entre la cohésion propre
                                                                 à une température un peu inférieure à leur
                       « au liquide et sa cohésion pour le corps
                                                                 point d’ébullition, qui est de — 10°.
                       « sur lequel il s’appuie : la chaleur modifie
                                                                   Ainsi, dans ce vase de platine chauffé
                       « ce rapport en diminuant la dernière, et
                                                                 au rouge blanc, il y a un corps dont la
                       « quand celle-ci est moindre que le double
                       « de la cohésion propre du liquide, il n’y
                                                                   (1) Daguin, Traité élémentaire de physique, tome I,
                       « a plus contact, et la chaleur ne peut plus   page 937. In-8“, Toulouse, 1855.
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