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LE FROID ARTIFICIEL.                                595

       corps mauvais conducteurs du calorique,   rent les premiers, en 1820, échouèrent
       une légère couche d’eau, qui finit par se   complètement.
       recouvrir dune pellicule de glace. On       Vers 1823, le physicien anglais Faraday,
       enlève cette pellicule à mesure qu’elle se   dans la suite de ses magnifiques études sur
       produit, car la chaleur de l’air la ferait   les changements d’état des corps, constatait
       fondre presque aussitôt, et on l’enferme   l’abaissement considérable de température
       dans une glacière. Ce procédé, comme il   provoqué par la vaporisation du gaz ammo­
       sera dit plus loin, est encore mis en pra­  niac liquéfié. En 1840, Thilorier étonnait
      tique, de nos jours, au Bengale.           le monde savant par ses admirables expé­
         La première tentative pour la production   riences sur la liquéfaction et la solidifi­
      artificielle du froid sans aucun emploi de   cation de l’acide carbonique, et par les
      la glace, appartient au physicien français,   prodigieux abaissements de température qui
       Lahire, qui, en 1685, parvint à produire   résultaient de la vaporisation de l’acide
       de la glace en enveloppant de sel ammo­   carbonique solidifié.
       niac mouillé, une fiole pleine d’eau, déjà   L’application industrielle de ces faits à
      refroidie (1).                             la production en grand de la glace artifi­
         Un physicien anglais, le docteur Cullen,   cielle, était, pour ainsi dire, dictée d’avance.
      constata, en 1755, que l’on peut obtenir   Un constructeur français, Bourgeois, cons­
      de la glace en plaçant l’eau dans le vide   truisit des appareils dans lesquels il
      de la machine pneumatique. Un autre phy­   essayait de mettre à profit, pour fabriquer
       sicien anglais, Nairne, reconnut que la va­  de la glace, l’abaissement de température
      peur d’eau était rapidement absorbée, si   produit par la vaporisation de l’éther, de
       l’on plaçait de l’acide sulfurique dans un   l’ammoniaque et d’autres produits volatils.
      vase près de l’eau enfermée sous la cloche   Les appareils de Bourgeois n’atteignirent
      de la machine pneumatique. Enfin, en       pas le but proposé, mais il faut dire que
       1811, le physicien Leslie, s’emparant de   ceux que l’on a construits de nos jours ont
       ces deux observations, fit l’expérience si   les mêmes bases sur lesquelles s’appuyait
       remarquable, que tout le monde a vu répé­  Bourgeois, c’est à-dire les expériences de
       ter dans les cours de physique. En plaçant   Leslie et de Faraday.
       sous la cloche d’une machine pneumatique    Après les essais de Bourgeois, il faut
       une petite soucoupe pleine d’eau, avec un   citer ceux de M. Widhausen, de Brunswik.
       large vase contenant de l’acide sulfurique,   Ce physicien construisit, vers 1850, une
       puis faisant le vide sous la cloche, Leslie   pompe à air où s’opérait la compression puis
       provoquait, à froid, l’ébullition de l’eau. La   l’expansion de ce fluide élastique. L’air, for­
       rapidité de cette vaporisation était accélérée   tement comprimé, allait se dilater dans un
       par l’acide sulfurique qui, absorbant les va­  cylindre métallique, et produisait, par cette
       peurs d’eau à mesure de leur production,   détente, un abaissement considérable de
       déterminait la congélation de l’eau.      température, que l’on utilisait pour produire
         11 y avait en germe, dans cette belle ex­  la congélation de l’eau. La machine em­
       périence, la production industrielle de la   ployait toujours le même air, qui se trouvait
       glace. Il fallut cependant un temps consi­  successivement comprimé, puis dilaté et
       dérable pour réaliser l’application de ce fait   revenait dans le corps de pompe, après avoir
       en grand. Taylor et Martineau, qui l’essayè-  provoqué la formation de la glace dans le
                                                 congélateur.
        (1) Mémoires de l’Académie des sciences de Paris, pour
       1685.                                       Les tentatives faites pour produire de la
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