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LE PHOSPHORE                                   533

        de six milliards, M. de Molon ajoutait, devant   bancs continus, ce qui s’est trouvé démontré
        une Commission d’enquête :                partout par les fouilles et les sondages. Ces
                                                  gisements sont étendus et réguliers, au point
         « Pans toutes les con trées de l’Eu rope, de nombreux   que, dans six départements, ils constituent
       établissements s’occupent sans relâche de transfor­  une zone d’environ 400 kilomètres de long
       mer en engrais toutes les matières propres à la pro­
                                                 sur 10 kilomètres de large. Dans de pareils
       duction végétale ; tout ce qui est susceptible de
       féconder le sol est aujourd’hui recherché avec avi­  gisements l’exploitation est tout à la fois
       dité, et cette recherche se fait non-seulement sur   fructueuse et facile.
       le continent, mais encore au delà des mers, dans   L’exploitation des phosphates est devenue
       l’Australie,le Pérou, l’Inde, surlacOte d’Afrique, etc.,   une industrie courante et considérable. Au­
       et, malgré tant d’efforts, ces importations et ces
       productions sont encore insuffisantes. Il était donc   jourd’hui, de nombreux ouvriers sont con­
       urgent de trouver de nouvelles sources pour éloi­  stamment occupés à l’extraction des nodules,
       gner à jamais de notre agriculture le danger qui la
                                                 et soixante-dix usines, établies tant à Paris
       menace. Cette nécessité apparaissait impérieuse,
       quand on pense que partout en Europe on a épuisé   que dans les départements, préparent ces
       les ossements qu’on pouvait consacrer à l’agricul­  nodules en vue des besoins agricoles.
       ture ; que l’Angleterre est allée en chercher sur   Ainsi, l’agriculture est en possession d’un
       tous les points du globe, et que, malgré tant de re­  engrais indispensable à la production du
       cherches, l’élévation de leur prix et les fraudes dont
       ils sont l’objet nous disent assez qu’ils deviennent   blé, et la France a acquis une nouvelle et
       de jour en jour plus rares. »             puissante industrie.
                                                    Les phosphates du Midi, qui sont les plus
         C’est sous l’empire de ces considérations   actifs, sont désignés sous le nom de phos­
       que M. de Molon entreprit de rechercher,   phates du Quercy, phosphates du Lot, du
       dans la nature minérale, des matières sus­  Tarn-et-Garonne et de l'Aveyron; leur ac­
       ceptibles d’être utilisées par notre agri­  tion sur les terres labourées est des plus
       culture.                                  remarquables. Les terrains vierges ou restés
         Il employa vingt années à fouiller le sol   depuis longtemps en friche, sont fertilisés
       de la France. 11 fit pratiquer des son­   par ce phosphate naturel en poudre.
       dages partout où les conditions géologiques   C’est que les terrains neufs contiennent
       lui faisaient soupçonner l’existence des no­  des débris organiques, végétaux ou animaux,
       dules phosphatés. Le résultat de ses re­  de l’humus, ainsi que de l’acide carbonique
       cherches, qui ne comprennent pas moins de   qui peut transformer le phosphate en pro­
       quarante-cinq départements, est fixé sur une   duit soluble, assimilable par les plantes.
       carte de France , qui est d’un grand prix   Quatre ou cinq usines exploitent les phos­
       pour l’agriculture.                       phates du Midi. Leur pulvérisation s’effectue
         Dans trente-neuf des départements signa­  sur une grande échelle. Ils se présentent
       lés, un très-grand nombre de gisements ont   alors sous forme de poudre fine, rougeâtre ou
       été reconnus d’une manière précise ; et,   jaunâtre.
       parmi ces trente-neuf départements, onze    Ce n’est pas seulement dans le Midi de la
       ayant été l’objet d’une élude plus atten­  France que les phosphates sont exploités.
       tive et plus approfondie, M. de Molon a   Cette même industrie existe dans les dépar­
       fait voir que les gisements ne constituent   tements de la Meuse, des Ardennes et du
       pas des amas épars et indépendants, mais   Pas-de-Calais.
       qu’il existe entre eux des liens de conti­   Les gisements des nodules phosphatés
        nuité, et qu’ils doivent être considérés   qu’on exploite depuis 1857, dans ces trois
        comme des affleurements d’un ou plusieurs   départements, ont une étendue considérable,
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