Page 528 - Les merveilles de l'industrie T3 Web
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il communiqua le procédé de sa prépara raît plus que comme une bizarre curio
tion au chimiste français Homberg, en re sité historique, mais qui était alors fort
tour d’un autre secret. admiré. C’était un tube au milieu duquel
Homberg était le savant que le régent se tenait, en équilibre, une petite figure
avait mis à la tête du laboratoire qu’il pos d’homme prodigieusement légère , puis
sédait à Paris. C’était un homme d’une qu’elle restait suspendue dans l’air en
haute portée d’esprit, et qui avait donné vertu de son poids spécifique. Cet instru
dans sa carrière de nombreux témoignages ment, qui portait le nom de petit homme
de son habileté et de son dévouement aux prophète, tenait lieu du baromètre, non en
sciences. Lorsque Kunckel le vit, il n’était core inventé. Exécutant certains mouve
pas encore entré dans la maison du régent, ments sous l’influence des variations de la
mais sa réputation scientifique était déjà à
son apogée. Il parcourait les divers Etats de
l’Europe, exerçant la médecine, et se per
fectionnant dans diverses sciences, qu’il cul
tivait avec un succès égal.
Homberg était né dans l’île de Java. Col
bert l’avait attiré à Paris ; mais, oublié après
la mort de ce ministre, il était tombé dans
une véritable détresse, dont il sortit d’une
manière assez piquante. Il travaillait avec
un autre chimiste, dans le laboratoire d’un
certain abbé de Chalucet, qui fut plus tard
évêque de Toulon, et qui ne dissimulait point
ses prédilections pour l’alchimie. Son com
pagnon de travail, passionné pour la même
science, voulut confondre l’incrédulité de
Homberg, et, pour cela, il lui fit présent,
comme raison tout à fait démonstrative,
d’un lingot d’or, qu’il assurait avoir fabri- [
qué. « Jamais, disait Homberg, on ne s’est
joué de moi d’une façon plus civile ni plus
opportune. » Il conserva son incrédulité et
vendit son lingot. 11 en retira quatre cents
livres, qui lui permirent de se rendre à pression atmosphérique, la petite figurine
Rome, d’où il recommença ses voyages, marquait, par ses déplacements, le beau
Homberg, en passant à Berlin, reçut de temps ou la pluie. Homberg avait appris
Kunckel le secret de la préparation du chez Otto de Guericke à construire cet ap
phosphore, par un de ces échanges qui pareil; il l’échangea avec Kunckel contre
étaient alors fort en usage entre savants. le procédé de la préparation du phosphore.
11 avait longtemps travaillé avec Olto de Homberg décrivit la manière de préparer
Guericke, l’inventeur de la machine pneu ce corps simple, dans un mémoire qui pa
matique et de la machine électrique. Le rut en 1692, dans le Recueil de l'Académie
bourgmestre de Magdebourg avait construit des sciences, sous ce titre : Manière de faire
un autre instrument, qui ne nous appa- le phosphore brûlant de Kunckel. C’est ainsi
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