Page 51 - Les merveilles de l'industrie T3 Web

INDUSTRIE DE L’EAU. 47

des glaçons retirés de la Nevva, fortement cause de la température extérieure, qui est
comprimés. Ces glaçons furent taillés de toujours, en hiver, de plusieurs degrés au-
manière à servir de pierres de maçonnerie. dessous de zéro.
La wm/son de glace de 1/40 se maintint de­
bout pendant plusieurs années, et traversa, La connaissance des propriétés de la neige
par conséquent, plusieurs étés. Le czar y et de la glace va nous permettre d’expliquer
donna des fêtes et des bals, auxquels toute la formation des glaciers, cette véritable
la cour fut conviée. 11 régnait une chaleur merveille delà nature, que l’industrie a su,
étouffante dans ces salons, composés de gla­ d’ailleurs, s’approprier, puisque journelle­
çons retirés du fleuve, et pourtant ses maté­ ment les glaciers du nord de l’Europe et de
riaux ne fondaient pas. Les lumières scin­ l’Amérique, fournissent au commerce d’é­
tillaient au dehors, à travers l’épaisseur des normes provisions de glace, que les vais­
parois transparentes. Les vitres de glace de seaux vont disséminer chez les habitants
l’édifice se couvraient de givre, mais te­ des régions chaudes des deux mondes.
naient bon. Ainsi que nous l’avons expli­ Qu’est-ce qu’un glacier? Un glacier est
qué, les murs se couvraient seulement d une une masse énorme d’eau congelée, une
couche d’humidité, et cette légère couche espèce de fleuve de glace, qui, placé dans
d’eau protégeait toute leur épaisseur contre la région des neiges perpétuelles, ne fond
la chaleur du dedans. jamais, ou du moins ne fond que par sa
La maison de glace avait 16m,88 de lon­ base située dans la vallée, et qui se renouvelle
gueur, 5m,19 de largeur et 6”,49 de hauteur; sans cesse par son sommet, situé à l’altitude
le poids du comble et des parties supérieures extrême de la montagne.
fut parfaitement supporté par le pied de Les glaciers ont existé de tout temps, cela
l'édifice. Devant le bâtiment, on plaça six va sans dire. Par conséquent, à toutes les
canons de glace, avec leurs affûts de glace, époques, les hommes ont pu contempler cet
et on tira ces canons à boulet. Chaque admirable et imposant phénomène de la na­
pièce perça, à soixante pas, une planche de ture. Les glaciers qui remplissent les an­
5 centimètres d’épaisseur. Les canons avaient fractuosités des hautes montagnes des Alpes
un décimètre d’épaisseur; ils étaient char­ ou celles de l’Asie et de l’Amérique, ont été,
gés avec un quarteron de poudre. Aucune pendant une longue série de siècles, parcou­
de ces bouches à feu d’un nouveau genre rus par les indigènes et les voyageurs. Et
n’éclata pendant le tir. pourtant on dirait qu’on n’a appris que
On aurait peine à croire à un tel prodige, d’hier leur existence. Ce n’est guère, en effet,
si les recueils scientifiques du temps n’a­ que depuis l’année 1840 environ, que la
vaient pris soin d’en conserver le souvenir. science s’est occupée, des glaciers. Mais,
Voilà, chers lecteurs, si je ne me trompe, comme pour prendre leur revanche d’une si
de quoi justifier le titre du présent ouvrage. longue abstention, les savants contemporains
La maison de glace de Saint-Pétersbourg est ont exécuté sur ce sujet, un ensemble énorme
certes une merveille de la science, ou de de travaux, d’études et d’observations. Des
1 industrie, comme on voudra! . flots d’encre ont été versés, des milliers
En ce qui concerne les carreaux de vitre d’expériences ont été faites, à l’occasion de
composés de glace, on peut rappeler que les ce phénomène, qui a été étudié jusque dans
Lapons ferment les fenêtres de leurs huttes, ses derniers détails.
avec une lame déglace de faible épaisseur. Les connaissances qui sont résultées de
Cette vitre en eau glacée ne fond jamais, à cette grande quantité de travaux, sont d’ail­