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32                    MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.

                     est familier aux Lapons, lorsqu’ils sont surpris   La neige contribue encore à fertiliser le
                     par des ouragans qui les forcent à s’arrêter.  sol en ce qu’elle détruit, par la double in­
                       M. Boussingault aconstaté àBéchelbronn,   fluence du froid et de la privation d’air, les
                     en 1841, le grand pouvoir préservateur de   insectes nuisibles qui vivent à la surface ou
                     la neige contre le froid. Il plaça un ther­  à une faible profondeur dans le sol.
                     momètre sur la neige en recouvrant seule­
                     ment sa boule de neige, ét il introduisit un   Les chutes de neige sont surtout abon­
                     second thermomètre sous la neige, en con­  dantes dans les montagnes, là où la tempé­
                     tact avec le sol. Le H février, à 5 heures   rature de l’air est presque constamment à
                     du matin, le thermomètre placé sur la neige   0°, point de congélation de l’eau. Dans les
                     marquait 1°,5, tandis que celui qui était placé   grandes hauteurs, la pluie n’est qu’un phé­
                     sous la neige ne marquait que 0°. Le 12 fé­  nomène de l’été; pendant l’hiver et au prin­
                     vrier, à 6 heures du matin, le thermomètre ■  temps, la vapeur vésiculaire ne se condense
                     placé sous la neige, marquait 12°, tandis que   guère qu’à l’état solide, c’est-à-dire à l’état
                     celui qui était placé sur la neige marquait   de neige.
                     3°,5. Le 13 février, à la même heure, le I   Les annales de la météorologie ont enre­
                     thermomètre sous la neige marquait 8°,2,   gistré des chutes de neige extraordinaires.
                     tandis que celui qui était placé par-dessus   En 1850, la neige couvrit l’Europe entière.
                     ne marquait que 2°.                       Dans les Alpes, sur le mont Saint-Bernard,
                       Ainsi, dans les matinées du 12 et du    elle s’éleva à 15 mètres de hauteur. Les re­
                     13 février, les feuilles et les tiges des plan­  ligieux étaient obligés, pour sortir du cou­
                     tes auraient subi un froid de — 12°, et   vent, de creuser un véritable tunnel à tra­
                     de — 8° si elles n’en eussent été préservées   vers les couches de neige. Dans cette même
                     par la neige qui les recouvrait et les pré­  année, la neige tomba abondamment en
                     servait du rayonnement nocturne.          Grèce. Toute la province de l’Attique en fut
                       Le 28 août 1844, M. Ch. Martins, au som­  couverte, à la hauteur d’un mètre. Elle
                     met du Mont-Blanc, constata une tempéra­  tomba également en abondance à Naples, à
                     ture de — 17°,6 à la surface de la neige et   Constantinople, en Corse, dans le Luxem­
                     de — 14°,6 à 2 décimètres de profondeur   bourg, etc. Dans ces divers pays, où la neige
                     sous la même neige.                       est si rare habituellement, les communica­
                       Dans les expériences faites à Paris, en ;  tions furent interrompues pendant plusieurs
                     janvier 1855, le commandant Rozet con­    jours et beaucoup de personnes périrent de
                     stata une température de — 1°,7 et de — 2°   froid sur les routes.
                     sous la neige, la température du sol décou­  Quand le vent vient à soulever les neiges
                     vert et balayé de neige étant — 2 1 /2 et — 3°.  accumulées sur les flancs des montagnes, il
                       La neige jouit, au dire des agriculteurs,   produit de véritables tempêtes de neige,
                     de propriétés fertilisantes. Cette croyance   tourmentes redoutables. La masse de neige
                     est très-fondée ; elle s’explique par la pré­  soulevée et dispersée par la violence du
                     sence, que nous signalions plus haut, de   vent, obscurcit l’air, et fait périr, par le froid
                     l’ammoniaque dans la neige. Ainsi que la   ou par l’asphyxie, toutes les créatures vi­
                     pluie et les brouillards, la neige, avons-   vantes qui se rencontrent sur son passage.
                     nous dit, renferme 7 milligrammes d’am­     En 1827, une tempête de neige envelop­
                     moniaque par litre d’eau ; elle retient et fixe   pant les troupeaux de la peuplade des Kir-
                     cette ammoniaque dans le sol mieux que ne   ghis, entre l’extrémité des monts Ourals et
                     le ferait la pluie, et surtout la pluie chaude.  le fleuve Volga, fit périr 280,500 moutons,
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