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260 MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.
les palais, les jardins, les viviers, dans les Les bains publics absorbaient une quan
camps des soldats, dans les bains, les ther tité considérable de l’eau amenée par les
mes , les naumachies, les théâtres, .dans les aqueducs. On se fait une idée suffisante de
fontaines publiques et dans les égouts. l’importance des bains publics de l’ancienne
La masse des eaux ainsi dérivées était Rome, quand on parcourt les restes des
énorme. Comme nous l’avons dit plus haut, Thermes d'Antonin Caracalla, qui sont les
Frontinus, le curateur des eaux sous les plus belles ruines de Rome, en même temps
empereurs Nerva et Trajan (l’an 98 avant que l’un des monuments les plus considé
J.-C.) en a donné la mesure dans un de ses rables du monde entier. Le périmètre exté
commentaires. Cette quantité en mesure mo rieur de ces bains publics n’était pas moin
derne était de 1,488,300 mètres cubes cou dre de 1,400 mètres. Dans le caldarium,
lant chaque vingt-quatre heures, et compo c’est-à-dire la piscine chaude, seize cents
sant de véritables fleuves artificiels réunis personnes pouvaient se baigner à la fois.
sur les sept collines. Cette masse d’eau Plusieurs milliers de citoyens s’y livraient,
équivaut à près de neuf fois le débit total du en même temps, au plaisir du bain. On y
canal de l’Ourcq; elle est à peu près égale à trouvait outre les piscines et les étuves, des
celle que la Marne verse dans la Seine, en été. bibliothèques pour les lecteurs, des gym
Toutes les eaux de Rome n’étaient pas nases pour les athlètes et les lutteurs, des
également limpides, également salubres, ce arènes pour les courses, des théâtres, des
qui détermina à les classer suivant les usages magasins où affluaient les acheteurs, des
auxquels on les destinait. L’eau Marcia fut marchés, des buffets pour les rafraîchisse
placée au premier rang et réservée tout ments, en un mot la réunion de tout ce qui
entière pour la boisson. L’dnzo vêtus, au pouvait amuser et distraire un peuple qui
contraire, fut destiné à l’arrosement des aimait à réunir les plaisirs de l’esprit à ceux
jardins et aux besoins les plus ordinaires de de la sensualité.
l’économie domestique. La figure 112 donne une vue des restes
La plus grande partie de ces eaux était des thermes d’Antonin Caracalla.
destinée aux usages publics. Elles coulaient Sous Trajan, Pline décrivait avec admira
nuit et jour parles fontaines; elles se ren tion ces magnifiques ouvrages : ces longues
daient ensuite, par des canaux souterrains, suites d’arcades conduisant vers Rome une
dans les naumachies, où elles arrivaient en incroyable quantité d’eau, les montagnes
assez grande abondance pour qu’on pût y si coupées, les roches percées, les vallées fran
muler des combats de vaisseaux, genre de chies ; et il ne trouvait rien de plus mer
spectacle qui plaisait beaucoup aux Romains, veilleux dans l’univers. Quatre siècles plus
et pour lequel on ne craignait pas de faire tard, au temps de Théodoric, pour donner
de grandes dépenses. C’est pour alimenter aux surveillants des eaux une haute idée
sa naumachie qu’Auguste avait fait cons de leurs fonctions, Cassiodore, gouverneur
truire l’aqueduc de 32,925 mètres de lon de Rome, écrivait :
gueur, qui portait l’eau Alsietina. L’empe
« A comparer entre eux les édifices de Rome, on
reur Claude transforma le lac Fucin en hésiterait à donner la préférence ; il faut distinguer
naumachie, en faisant placer tout autour pourtant ceux dont l’utilité fait le prix, de ceux que
des rives de ce lac des sièges pour les specta leur seule beauté recommande. Le forum de Trajan
est un prodige, meme pour des yeux accoutumés à
teurs. Les provinces suivirent l’exemple de
le voir chaque jour. Le Capitole porte les chefs-
la capitale de l’empire. On a reconnu à Metz d’œuvre du génie de l’homme. Mais ce n’est point là
et à Saintes des restes de naumachies. qu’est la source de la santé, du bien-être et de la vie.