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256 MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.
ble de longueur, et il n’est supérieur, ni successivement à Rome une énorme masse
par les qualités des matériaux, ni par la d’eaux, empruntées à différentes sources, et
forme architecturale, à son devancier sécu à faire coulera travers la ville un véritable
laire. On peut en dire autant de l’aqueduc fleuve d’eaux pures qui aurait suffi aux be
duCroton, à New-York, qui est plus long soins d’une population vingt fois plus con
encore que le pont du Gard. sidérable que celle de Rome.
Dès la fin du premier siècle après J.-C.,
11 ne sera pas sans intérêt de jeter un sous les empereurs Nerva et Trajan, il y
coup d’œil rapide sur les plus remarquables avait à Rome neuf aqueducs qui apportaient
aqueducs que l’antiquité nous ait laissés. un immense volume d’eau, et qui desser
Ce serait une tâche beaucoup trop lon vaient les quartiers de la ville à des niveaux
gue que de passer en revue tous les aque différents. Six de ces aqueducs Appia,
ducs célèbres dans l’histoire de l’art. Si Anio vêtus, Marcia, Aqua Virgo, Claudia et
l’on voulait rendre ce tableau complet, il Anio Novus, prenaient l’eau dans la vallée de
faudrait sortir de l’Europe, pour montrer le l’Anio; deux autres, nommés Tepula et
nombre considérable de ces ponts-aqueducs Julia, détournaient les sources des petits
que les Romains avaient construits dans une affluents de la rive gauche du Tibre infé
partie de l’Asie et du nord de l’Afrique. rieur. Le dernier prenait Eeau du lac Alsie-
Quelques-uns sont encore debout aujour tinus, situé sur la rive droite du Tibre, au
d'hui, et n’ont pas cessé, malgré les injures nord-ouest de Rome : d’où le nom d’AZ-
du temps, de verser dans les lieux habités sietina.
le bienfait de leurs eaux. Un grand nom Ces aqueducs qui portaient, comme on le
bre embellit de ruines sublimes les envi voit, les noms de ceux qui les firent cons
rons des cités, et témoignent, par la ma truire ou des sources auxquelles ils étaient
jesté de leurs proportions et leurs restes empruntés, avaient été édifiés successive
impérissables, du génie architectural des ment, suivant un ordre que nous allons in
Romains. diquer.
Nous passerons en revue les plus célèbres Le premier aqueduc (Appia) fut construit
des ponts-aqueducs construits par les Ro 441 ans avant J.-C. par le censeur Appius
mains et leurs successeurs jusqu’aux temps Claudius Cœcus. 11 rassembla les sources
modernes, c’est-à-dire les aqueducs de l’an éparses des montagnes de Frascati et les con
cienne Rome, celui de Nîmes mponl du Gard, duisit jusqu’à Rome, tantôt par des canaux
ceux de Lyon, de Metz, de Coutances, etc. souterrains, creusés dans la montagne, tantôt
par des arcades. Près de la porte Nœvia, ses
Assise au bord du Tibre, près du con eaux se divisaient en deux branches, l’une
fluent de ce fleuve avec l’Anio (aujourd’hui dirigée vers le mont Testaceus, l’autre vers
le Téverone), Rome occupe les derniers le pont Sublitius. Elles alimentaient vingt
monticules d’une chaîne de hauteurs qui châteaux d'eau. Auguste réunit à ces eaux
borde au sud-est le bassin de l’Anio. une partie de celles qui portent son nom.
L’insalubrité des eaux du Tibre et leur C’est sans doute la raison qui fit donner à
état de trouble trop fréquent, le besoin leur réunion le nom de Gemelles.
d’assainir la ville et d’établir des fontaines Le second aqueduc construit fut l’Anm
dans les quartiers dont la population aug vêtus : les dépouilles provenant du roi Pyr
mentait de jour en jour, l’usage de bains rhus en firent les frais. 11 fut commencé
qui se multipliaient, amenèrent à dériver 481 ans avant J.-C. par le censeur CuriusDen-