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251 MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.
remblai ou d’un pont, rendent à l’art de la de 12 mètres de haut, et remontaient enfin
conduite des eaux des services immenses. la pente opposée pour aboutir à un second
On croit généralement que l’invention des réservoir formant la tête de l’aqueduc con
tuyaux-siphons est de date moderne ; mais tinué. Les deux autres passages étaient pra
c’est là une erreur, car les architectes romains tiqués par des travaux analogues.
ont fait usage en plusieurs circonstances de Un certain nombre de ces tuyaux que l’on
tuyaux-siphons, ou siphons renversés, qu’ils a retrouvés encore en place, portaient cette
construisaient avec d’énormes conduits de inscription : TL CL. CÆS. (Tiberius Clau-
plomb. L’aqueduc du mont Pila qui condui dius Cæsar) (1).
sait à Lyon les eaux qui descendent ou sor Rondelet qui a traduit en français le
tent de cette montagne, présentait, entre Commentaire de Frontinus donnant la des
Soucieux et Chaponot, un magnifique siphon cription des aqueducs de l’ancienne Rome,
renversé, qui constitue un des plus curieux a fait suivre sa traduction de la description
ouvrages de l’architecture ancienne. du pont-siphon du mont Pila, que les Ro
LafigurellOreprésente le tuyau-siphon du mains avaient construit entre Soucieux et
mont Pila, restauré d’après les restes qu’on Chaponot.
en trouve encore sur la colline de Chaponot
et dans la vallée. « Le vallon qui est entre Soucieux et Chaponot,
dit Rondelet, a 200 pieds environ de profondeur.
L’aqueduc du mont Pila avait été cons
Cinq ponts l’un sur l’autre auraient été à peine éle
truit par ordre de l’empereur Claude, qui vés suffisamment pour porter l’aqueduc d’un coteau
était né à Lyon. Il servait à amener les eaux à l’autre, et le dernier de ces ponts aurait eu envi
ron 400 toises de longueur.
qui arrosaient les jardinsdu palais de Claude,
« Le vallon entre Chaponot et Sainte-Foy, d’envi
situé sur le point le plus élevé de la colline ron 300 pieds de profondeur, et dans lequel passe la
de Fourvières. Les eaux du mont Pila, re rivière L’Izeron, aurait exigé huit rangs d’arcades
cueillies près de Saint-Étienne en Forez, à les uns sur les autres, tous très-longs. Le troisième
vallon, entre la colline du petit Sainte-Foy et celle
50 kilomètres environ de Lyon, devaient de Fourvières, aurait exigé trois rangs d’arcades.
franchir, avant d’arriver à la ville, un cer «Toutes ces constructions auraient exigé des tra
tain nombre de vallées, plus ou moins pro vaux prodigieux et une dépense énorme, capables
d’arrêter l’exécution du projet; mais l’intelligence
fondes. L’aqueduc passait treize de ces dé
des architectes qui en furent chargés leur fit imagi
pressions sur des arcades assez hautes pour ner de substituer à ces constructions des tuyaux en
laisser couler l’eau en conduite libre avec plomb, d’un travail et d’une dépense bien moins
considérables.
une faible pente. Mais pour trois vallons,
«Ainsi, pour le passage du vallon du Garou, l’a
dont l’un, celui de l’Izeron, ne s’abaissait pas queduc, parvenu sur la hauteur de la colline, ré
à moins de 100 mètres au-dessous du niveau pandait ses eaux dans un réservoir ou cuvette, placé
sur une tour carrée.
de l’aqueduc, la dépense avait sans doute
« Le mur de ce réservoir, du côté du vallon, était
paru trop considérable aux architectes ro percé, à 9 pouces au-dessus du fond, de neuf ouver
mains, et l’on avait eu recours aux siphons. tures ovales, de 12 pouces de hauteur sur 10 de lar
Douze tuyaux de plomb, de 21 centimètres geur, à 7 pouces d’intervalle les unes des autres.
C’est par ces ouvertures que l’eau sortait du réser
de diamètre, partaient du fond d’un réser
voir de chasse par autant de tuyaux de plomb qui
voir, dans lequel l’aqueduc versait son pro descendaient dans le vallon, couchés d’abord sur un
duit en arrivant au val de l’Izeron, puis des des arcs rampants et ensuite sur un massif de ma
çonnerie, dont la pente était réglée jusqu’aux ar-
cendaient sur le flanc de la montagne, portés
tantôt par des arceaux rampants, tanlôt par (1) Delorme, Recherches sur les aqueducs de Lyon cons
un massif de maçonnerie. Ils traversaient truits par les Romains. — Le père Colonia, Inst, littér.
de lu mile de Lyon. — Flacheron, Mémoire sur trois an
ensuite le fond de la vallée sur des arcades ciens aqueducs de Lyon.