Page 60 - Les merveilles de l'industrie T1
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54                    MERVEILLES DE L’INDUSTBIE.

                         sent être devenus que très-tard d’un usage |  ovale, qu’elles ne perdaient jamais de vue.
                         général chez les Grecs. On se servait chez   Claudien, dépeignant Vénus à sa toilette, dit
                         eux presque exclusivement de miroirs entiè­  qu’elle est assise sur un siège, occupée sou­
                         rement métalliques, composés d’une surface   vent elle-même à sa coiffure, tandis qu’une
                         très-réfléchissante. Les Grecs travaillaient   nymphe accroupie soutient au-devant d’elle
                         fort bien les métaux, et la description du   un miroir qui réfléchit ses traits. Mais le plus
                         bouclier d’Achille qu’IIomère nous a laissée   souvent les dames grecques se paraient ou
                         le prouve suffisamment. Cet airain si brillant   achevaient leur toilette en tenant elles-mêmes
                         qu’il éblouissait les combattants lorsqu’il |  à la main un miroir rond ou ovale. C’est ce
                         composait des boucliers et des armes, servait   que montrent les dessins de beaucoup de
                         également à fabriquer de resplendissants mi­  vases étrusques découverts à Pompéi.
                         roirs.
                            La ville de Corinthe eut, en Grèce, le pri­  Les Romains empruntèrent aux Grecs la
                         vilège de la fabrication des miroirs. 11   fabrication des miroirs de métal. La ville de
                         appartenait à la ville des hétaïres de f bri­  Brindes devint le siège de cette fabrication,
                         quer les bijoux destinés à reproduire les
                         formes de la beauté.
                            C’est pour la confection des miroirs que
                         fut inventé, à Corinthe, le bronze blanc. Cet
                         alliage très-réfléchissant et susceptible de
                          recevoir un très-beau poli, se composait de
                         cuivre et d’étain, avec addition d’une certaine
                         quantité d’arsenic. Les fondeurs de nos jours
                          sont, en effet, parvenus à reproduire le bronze i
                          blanc de Corinthe, par l’emploi de l’arsenic
                          ajouté à la fonte.
                           Chez les Grecs, les miroirs de métal n’af­
                          fectaient pas exclusivement la forme ronde, '
                          propre aux miroirs de verre des Egyptiens.
                          On en fit de carrés, mais le plus grand nombre      Fig. 47. — Miroirs romains.
                          étaient ovales, comme la figure humaine
                          qu’ils devaient refléter. On les tenait à la   et elle le disputa bientôt à Corinthe pour la
                          main au moyen d’un manche.                perfection des produits.
                            Corinthe devait fabriquer des miroirs d’as­  Les Romains faisaient usage de miroirs
                          sez grandes dimensions, s’il est vrai que Dé-   de bronze, d’étain, de fer, ou d’obsidienne,
                          mosthène,comme l’assure Quintilien, étudiât   pierre noire qui revêt facilement un poli et un
                          dans un miroir de la grandeur d’un homme   brillant extraordinaires. Mais un perfection­
                          les gestes destinés à accompagner le débit de   nement remarquable fut réalisé à Rome, dans
                          ses discours. On voyait les plus grands mi­  cette branche d’industrie. Un artiste nommé
                          roirs d’airain dans le temple d’Esculape, dieu   Praxitèle, qui vivait sous le consulat de
                          à qui l’on attribuait, comme le rappelle Ci­  Pompée, fabriqua, dit-on, le premier, des
                          céron, ce genre d’invention.              miroirs d’argent. Le prodigieux pouvoir ré­
                            Les dames grecques étaient à leur toilette   flecteur dont jouit l’argent, fit promptement
                          dans la même position que celles de notre   abandonner les anciens miroirs de fer, d’ai­
                          temps. Elles s’asseyaient devant un miroir   rain ou d’obsidienne.
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