Page 314 - Les merveilles de l'industrie T1
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POTERIES, FAÏENCES ET PORCELAINES.                            309

          cédé de fabrication de la porcelaine de   élève Bôtticher, entré depuis peu dans sa
          Chine.                                    maison.
            Jean-Frédéric Bôtticher était né le 4 fé­  Le soin avec lequel ce jeune homme exé­
          vrier 1682, à Schleiz, dans le Voigtland, en   cuta ses prescriptions, plut beaucoup à Las­
          Saxe(l). Il fut en grande partie élevé à   caris, dont la maladie, vraie ou feinte, eut
          Magdebourg, auprès de son père, qui rem­  bientôt disparu. Il s’entretint plusieurs fois
          plissait des fonctions à la Monnaie.      avec le jeune homme, et de ces entretiens il
            Ce dernier avait des idées manifestement
          tournées aux sciences occultes, et prétendait
          posséder le secret de la pierre philosophale.
          C’est probablement à l’éducation qu’il reçut
          de son père que le jeune Bôtticher dut les
          prédilections qu’il manifesta de très-bonne
          heure pour les sciences secrètes. Il avait
          une dose très-prononcée de superstition, et
          mettait une certaine importance à être né le
          dimanche, ce qui lui donnait, d’après un
          préjugé du temps, la faculté de lire dans
          l’avenir. Ayant eu le malheur de perdre son
          nère, et sa mère s’étant mariée en secondes 1
          noces, il dut songer à embrasser une pro­
          fession.
            11 n’avait que dix-neuf ans lorsqu’il entra
          comme apprenti chez l’apothicaire Zorn, à
          Berlin.
            En ce temps-là, un alchimiste, dont le
          véritable nom était un mystère, mais qui se
          faisait appeler Lascaris (nom qu’il avait
                                                                Fig. 2?4 — Bôtticher.
          choisi pour confirmer l’origine grecque
          qu’il s’attribuait), étonnait l’Allemagne par   résulta entre eux une sorte d’amitié et même
          ses prétendues transmutations des métaux   d’intimité. C’est que, pendant leur conver­
          vils en or. Il allait de ville en ville, rendant   sation, Bôtticher, sans se douter qu’il par­
          les savants et le public témoins, ou plu­  lait à un maître de l’art, avait confié à Las­
          tôt dupes, de ses opérations d’alchimie.  caris qu’il s’occupait d’hermétique, qu’il
            En 1701, Lascaris passant par Berlin,   avait lu tous les ouvrages de Basile Valen­
          tomba malade, et fit demander l’apothicaire   tin, et qu’il travaillait d’après les écrits de
          Zorn, pour quelques remèdes. Maître Zorn '  cet alchimiste.
          ne jugeant pas à propos de se déranger      Au moment de quitter Berlin, Lascaris
          pour un inconnu, se fit remplacer par son  prit à part le jeune homme, et lui déclara
                                                    qui il était, ajoutant qu’il voulait lui laisser
            (I) On a écrit son nom de manières très-différentes. En-
          gelhardt, son historien, l’appelle Bôttger. Schmieder, au­  un témoignage de son amitié. Il lui fît pré­
          teur allemand d’une Histoire de l’alchimie, non traduite en   sent de deux onces de sa poudre philoso­
          français, écrit llolticher; d’autres, Botiger, Bœttger et
          Bottger. Nous adoptons l’orthographe de Schmieder, dont   phale, et lui recommanda de ne pas en
          l’autorité bibliographique est incontestable.  indiquer l’origine, et surtout de n’en faire
            Ajoutons que, suivant Klem, Bôtticher serait né en 1665,
          et non en 168?, comme le dit Engelhart.   usage que longtemps après son départ.
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